Interdiction de voyager pour les personnes admises à titre provisoire

Suisse, 06.12.2021 – Lors de sa session de décembre, le Parlement suisse a entériné une réforme de la LEI qui interdit en principe de voyager aux personnes admises à titre provisoire (permis F). Cette décision concerne aujourd’hui environ 50’000 personnes en Suisse, qui ne sont pas reconnues comme réfugié·es mais qui peuvent demeurer sur le territoire souvent des années.

L’OSAR et l’EPER dénoncent un durcissement de l’interdiction de voyager à la fois inutile, disproportionné et incompatible avec les droits fondamentaux, notamment le droit à la famille. Ces organisations rappellent que des parents ne pourront plus rendre visite à leurs enfants qui résideraient dans un autre pays que leur pays d’origine. Une famille au sens large séparée par le règlement Dublin entre deux pays européens n’aurait plus non plus la possibilité de se rencontrer.

L’OSAR souligne également que ce statut provisoire induit des obstacles à l’intégration notamment sur le marché du travail. De ce point de vue, la réforme de la LEI adoptée en décembre 2021 apportera quelques améliorations ponctuelles mais si limitées qu’elles ne concerneront que très peu de personnes.

Sources: EPER, «Décision parlementaire bafouant les droits fondamentaux des personnes admises à titre provisoire», 08.12.2021 ; OSAR, «Une interdiction de voyager très stricte au lieu d’une intégration facilitée pour les titulaires d’une admission provisoire», 06.12.21.

Voir également: ODAE romand, «Modification de la LEI: interdiction de voyager pour les personnes admises à titre provisoire?», brève, 31.10.19 ; asile.ch, «Restrictions des voyages à l’étranger des permis F | Opposition des milieux de l’asile», 22.11.19.

Cas relatifs

Cas individuel — 10/04/2025

Des violences conjugales reconnues par un Centre LAVI sont jugées trop peu intenses par les tribunaux

Eja*, originaire d’Afrique de l’est, rencontre Reto*, ressortissant suisse, en 2019. Leur mariage est célébré en avril 2021 et Eja* reçoit une autorisation de séjour. L’année qui suit est marquée par des disputes et des violences au sein du couple, et une première séparation de courte durée. En février 2023, Eja* consulte le Centre LAVI du canton, qui la reconnait victime d’infraction. En juillet, Eja* dépose une plainte pénale contre son époux pour harcèlement moral, rabaissements et injures, discrimination raciale et contraintes. En novembre 2023, Eja* dépose une deuxième plainte. Son médecin confirme des symptômes de stress émotionnel élevé. En février 2024, le SPoMi révoque l’autorisation de séjour d’Eja* et prononce son renvoi de Suisse, au motif que la durée effective de la communauté conjugale n’a pas dépassé trois ans. En août 2024, le Tribunal cantonal rejette le recours déposé par Eja*, au motif que l’intensité des violences psychologiques n’atteint pas le seuil exigé par la jurisprudence. Le Tribunal conclut à l’absence de raison personnelle majeure permettant de justifier le maintien de l’autorisation de séjour d’Eja*. Le Tribunal fédéral, dans son arrêt du 14 novembre 2024, confirme la décision du SPoMi et rejette le recours d’Eja*.
Cas individuel — 11/02/2025

Mineure, elle obtient une transformation de permis F en B pour respect de la vie privée

Dara* est au bénéfice d’une admission provisoire depuis près de 7 ans lorsqu’elle dépose une demande d’autorisation de séjour, rejetée par le canton. Dara* interjette alors un recours auprès de la Cour administrative cantonale, puis du Tribunal fédéral (TF). Bien que mineure, le TF lui reconnait la possibilité de faire une telle démarche sans passer par ses représentant·es légaux·ales. Le TF admet ensuite le recours et renvoie la cause au SPoMI pour délivrance d’une autorisation de séjour (permis B).
Cas individuel — 10/09/2024

Un couple avec enfant doit se battre pour se voir reconnaître son droit au mariage et au regroupement familial

Kayden* est originaire d’Angola et arrive en Suisse à l’âge de 5 ans. Jusqu’en 2015, il bénéficie d’un permis B, qu’il perd en 2016 suite à plusieurs infractions pénales. Kayden* a un fils né en 2014. Il se met en ménage avec Valérie, ressortissante suisse. En 2021, Valérie* est enceinte et le couple fait une demande d’autorisation de séjour pour Kayden* en vue de leur mariage, mais le Service de la population du canton de Fribourg (SPoMI) refuse la demande et prononce le renvoi de Suisse. La décision est motivée par le fait que Kayden* a transgressé à plusieurs reprises la loi, que son intégration économique serait un échec et que sa relation avec son fils se limiterait à l’exercice d’un droit de visite. Kayden* dépose un recours contre cette décision au près du Tribunal cantonal (TC). Le couple devra attendre jusqu’en octobre 2022 pour que le TC admette le recours de Kayden*. Le TC reconnait que rien ne permet de douter des intentions matrimoniales des fiancé·es et qu’un renvoi en Angola priverait les enfants du lien avec leur père. Il considère en outre qu’il serait disproportionné d’exiger le retour du recourant en Angola, pays qu’il a quitté à l’âge de cinq ans et qu’il ne connait pas, pour revenir en Suisse une fois le mariage conclu. Le TC annule donc la décision du SPoMI et l’invite à délivrer à Kayden* une autorisation de séjour en vue du mariage.
Cas individuel — 24/08/2009

L’entêtement de l’ODM l’empêche de faire le deuil de sa famille

Au bénéfice d'une admission provisoire depuis 2002, « Makaya » a dû mener près de 15 mois de bataille juridique avec l’ODM pour obtenir un visa de retour afin de finalement pouvoir se rendre au Congo et se recueillir sur les tombes de sa fille et de sa sœur.