Après 15 ans en Suisse et un divorce, une famille est menacée de séparation

Valais, 27.04.2022 – Mme Ngono s’exile du Cameroun et demande l’asile en Suisse en 2007 avec ses deux enfants de 9 et 8 ans. Attribuée au canton du Valais, elle se forme et est engagée pour travailler en tant qu’auxiliaire de santé dans un EMS dès 2010. Cette même année, elle se marie avec un ressortissant suisse et obtient un permis de séjour. Elle restera en ménage avec lui durant presque 3 ans.

En 2015, Mme Ngono se voit refuser la prolongation de son permis de séjour, au motif que son union a duré moins de 3 ans. Avec l’aide d’un mandataire, elle entame une procédure de recours. Le Conseil d’État valaisan prend 5 ans pour se déterminer et rend finalement en 2020 une réponse négative. Cela fait alors 13 ans qu’elle vit en Suisse.

En 2015, Mme Ngono a un 3ème enfant. Avec cette décision négative, la famille est menacée de déchirement: les deux enfants majeurs pourraient rester en Suisse, tandis qu’elle-même et son fils mineur seraient expulsés. Les aîné·es, qui suivent des études à l’Université, perdraient en outre un soutien moral important, ainsi que le droit à des bourses. Mme Ngono interjette un recours devant le Tribunal cantonal, puis le Tribunal fédéral. Elle demande la prolongation de son permis, en raison des violences psychologiques qu’elle a subies de la part de son ex-mari (art. 50 LEI) et en raison de son droit au respect de la vie familiale (art. 8 CEDH). En vain. En mars 2022, elle reçoit un ordre d’expulsion de Suisse pour le 1er mai.

Une pétition a été lancée le 25 avril, demandant au canton de faire usage de sa marge de manœuvre afin de lui délivrer un permis humanitaire fondé sur un cas de rigueur. Elle a déjà reçu le soutien du conseil d’administration de l’EMS où travaille Mme, du Conseil communal de Collombey-Muraz, des Jeunesses socialistes du Valais romand, ainsi que du comité de l’Association des EMS valaisans.

Source: lematin.ch, «Valais: une expulsion qui sabote 15 ans d’intégration», 27.04.2022; arrêt du TF 2C_1051/2021 du 11 mars 2022.

Voir également: Groupe de travail Femmes migrantes & violences conjugales, Rapport parallèle sur les violences conjugales à l’égard des femmes étrangères ayant un statut précaire en Suisse à l’attention du GREVIO, juin 2021; ODAE romand, Femmes étrangères victimes de violences conjugales, rapport thématique, mars 2016.

Cas relatifs

Cas individuel — 10/04/2025

Des violences conjugales reconnues par un Centre LAVI sont jugées trop peu intenses par les tribunaux

Eja*, originaire d’Afrique de l’est, rencontre Reto*, ressortissant suisse, en 2019. Leur mariage est célébré en avril 2021 et Eja* reçoit une autorisation de séjour. L’année qui suit est marquée par des disputes et des violences au sein du couple, et une première séparation de courte durée. En février 2023, Eja* consulte le Centre LAVI du canton, qui la reconnait victime d’infraction. En juillet, Eja* dépose une plainte pénale contre son époux pour harcèlement moral, rabaissements et injures, discrimination raciale et contraintes. En novembre 2023, Eja* dépose une deuxième plainte. Son médecin confirme des symptômes de stress émotionnel élevé. En février 2024, le SPoMi révoque l’autorisation de séjour d’Eja* et prononce son renvoi de Suisse, au motif que la durée effective de la communauté conjugale n’a pas dépassé trois ans. En août 2024, le Tribunal cantonal rejette le recours déposé par Eja*, au motif que l’intensité des violences psychologiques n’atteint pas le seuil exigé par la jurisprudence. Le Tribunal conclut à l’absence de raison personnelle majeure permettant de justifier le maintien de l’autorisation de séjour d’Eja*. Le Tribunal fédéral, dans son arrêt du 14 novembre 2024, confirme la décision du SPoMi et rejette le recours d’Eja*.
Cas individuel — 11/12/2024

«Je n’en pouvais plus, je ne savais plus vers qui me tourner. Je suis allée porter plainte mais la police m’a arrêtée pour séjour illégal.»

Dora* arrive en Suisse sans statut de séjour en mai 2022 et rencontre Jorge*, originaire d’Espagne, à Genève. Après deux ans de harcèlement et de menaces proférées par Jorge* à son encontre, elle finit par se rendre dans un commissariat de la police cantonale genevoise pour déposer plainte. La police lui indique qu’il n’y a pas matière à enregistrer une plainte, mais qu’elle doit en revanche rendre des comptes pour son séjour illégal. Dora* est alors détenue une nuit et auditionnée par le Ministère public le lendemain. Compte tenu de sa décision de quitter volontairement le territoire, les autorités classent la procédure. Sa plainte à l’encontre de Jorge* n’est jamais enregistrée. Fin décembre 2024, Dora* quitte définitivement la Suisse, sans avoir pu obtenir justice.
Cas individuel — 29/10/2024

Quatre ans de procédure pour se voir reconnaître son statut de victime de violences domestiques

Arrivée en Suisse en 2018 à la suite de son mariage avec un ressortissant suisse, Amanda* est rapidement victime de violences domestiques. À la suite de la séparation du couple, et malgré les documents attestant des violences subies par Amanda* ainsi que de ses craintes, fondées, de représailles de sa belle-famille en cas de retour, le SEM refuse de renouveler son autorisation de séjour et prononce son renvoi vers le Sri-Lanka. Amanda* dépose un recours au TAF contre cette décision. En août 2023, le TAF lui donne raison : il annule la décision du SEM et ordonne l’octroi d’une nouvelle autorisation de séjour en faveur d’Amanda* sur la base de l’art. 30 LEI qui permet de déroger aux conditions d’admission pour tenir compte de cas individuels d’une extrême gravité (F-2969/2020). Le TAF que reconnait les violences domestiques subies par Amanda* – que le SEM avait minimisées, voire niées – et leurs conséquences sur son état de santé, tout comme les difficultés de réintégration en cas de retour au pays d’origine, constituent des éléments suffisants pour admettre la prolongation de son séjour en Suisse.
Cas individuel — 03/12/2014

Atteinte d’un grave cancer, elle doit partir sans garantie d’accès aux soins

« Olga » est une ressortissante ukrainienne atteinte d’un grave cancer. L’ODM refuse de lui octroyer un permis de séjour pour cas de rigueur, au motif que les soins sont disponibles en Ukraine. Les autorités ne prennent ainsi nullement en considération la problématique de l’accès à ces prestations dans un pays gravement affecté par la corruption.