Un projet de Pacte européen sur la migration et l’asile aux relents sécuritaires

Suisse, 09.11.2023 – Le pacte européen sur la migration et l’asile, en phase de négociation pour être adopté en juin 2024 (avant les élections parlementaires européennes), réveille plusieurs inquiétudes pour les migrant·exs en Europe. Le pacte est critiqué pour son orientation vers des politiques de défense, de criminalisation des personnes en exil et de sécurité intérieure, plutôt que des solutions humanitaires et de solidarité. Les mesures proposées incluent un durcissement de la surveillance et des procédures aux frontières et des accords renforcés avec des pays tiers telle que la Turquie.

Un point de préoccupation est le tri drastique proposé aux frontières extérieures de l’UE, qui vise à réduire le nombre de personnes accédant à l’Europe. De plus, les critères de détermination des États tiers estimés « sûrs » sont assouplis.

Un autre problème relevé concerne le manque de solidarité entre les États membres de l’UE. Le pacte ne propose pas de mécanisme efficace de partage des responsabilités, par des contributions financières par exemple. Selon l’OSAR, la Suisse, en tant que membre associé de Schengen/Dublin, est également impliquée dans ces décisions et devrait avant tout s’engager en faveur des droits humains et de la dignité des demandeur·sexs d’asile.

L’OSAR appelle donc à un changement de cap vers des politiques migratoires qui mettent l’accent sur les droits humains, la dignité et la solidarité, tant pour la Suisse que pour l’UE, au lieu de renforcer les frontières et de restreindre l’accès à la protection pour les migrant·exs en quête de sécurité.

Sources: OSAR, «La procédure d’asile aux frontières extérieures de l’UE : l’Europe renonce à la notion de protection» ; OSAR, «Pacte européen sur la migration et l’asile» ; OSAR, «Pacte de l’UE : protection des personnes réfugiées et droits humains sacrifiés», 09.06.2023.

Voir également: ODAE ROMAND, «Refoulements aux frontières et atteintes aux droits humains», 14.10.2021 ; ODAE ROMAND, «Incendie de Moria : la réponse de la Suisse critiquée», 05.10.2020.

Cas relatifs

Cas individuel — 14/04/2025

«Mes enfants sont terrorisés. Je ne sais plus quoi faire ni comment arrêter ce calvaire.»

Léonie*, ressortissante Burundaise, est victime de persécutions dans son pays. En juin 2022, elle demande l’asile en Suisse avec ses trois enfants. Leur demande est rejetée en 2023 par le SEM puis par le TAF. La famille subit alors un véritable harcèlement policier: alors que Léonie* est hospitalisée en psychiatrie, son fils est arrêté à leur domicile pour être détenu à l’aéroport puis relâché. Sa fille aînée est également arrêtée à deux reprises, emmenée à l’aéroport puis relâchée. Enfin, la fille cadette se retrouve hospitalisée en psychiatrie, dans un état de choc, après que des agents ont essayé de l’arrêter au cabinet de sa psychologue. Malgré ces arrestations à répétition, Léonie* et ses enfants demandent le réexamen de leur décision d’asile, en raison d’éléments nouveaux survenus au Burundi et de l’état de santé de Léonie* qui se dégrade. Le SEM suspend l’exécution du renvoi de cette dernière, mais refuse de réexaminer la demande des enfants, désormais tous trois majeurs.
Cas individuel — 10/09/2024

Un couple avec enfant doit se battre pour se voir reconnaître son droit au mariage et au regroupement familial

Kayden* est originaire d’Angola et arrive en Suisse à l’âge de 5 ans. Jusqu’en 2015, il bénéficie d’un permis B, qu’il perd en 2016 suite à plusieurs infractions pénales. Kayden* a un fils né en 2014. Il se met en ménage avec Valérie, ressortissante suisse. En 2021, Valérie* est enceinte et le couple fait une demande d’autorisation de séjour pour Kayden* en vue de leur mariage, mais le Service de la population du canton de Fribourg (SPoMI) refuse la demande et prononce le renvoi de Suisse. La décision est motivée par le fait que Kayden* a transgressé à plusieurs reprises la loi, que son intégration économique serait un échec et que sa relation avec son fils se limiterait à l’exercice d’un droit de visite. Kayden* dépose un recours contre cette décision au près du Tribunal cantonal (TC). Le couple devra attendre jusqu’en octobre 2022 pour que le TC admette le recours de Kayden*. Le TC reconnait que rien ne permet de douter des intentions matrimoniales des fiancé·es et qu’un renvoi en Angola priverait les enfants du lien avec leur père. Il considère en outre qu’il serait disproportionné d’exiger le retour du recourant en Angola, pays qu’il a quitté à l’âge de cinq ans et qu’il ne connait pas, pour revenir en Suisse une fois le mariage conclu. Le TC annule donc la décision du SPoMI et l’invite à délivrer à Kayden* une autorisation de séjour en vue du mariage.
Cas individuel — 01/01/2024

Harcelée en Croatie, une famille est menacée d’y être renvoyée

En 2019, Romina* et Khaleel* quittent l’Afghanistan avec leur fille (Emna*), encore mineure et leurs trois fils majeurs. Ils demandent l’asile en Suisse en octobre 2020, après être passé∙es par la Croatie. La famille raconte avoir tenté de passer la frontière entre la Bosnie et la Croatie à plus de 15 reprises, avoir été arrêté∙es par les autorités croates puis maltraité·es, volé·es, déshabillé·es et frappé·es. En février 2020, le SEM rend une décision NEM Dublin. Le mandataire d’Ehsan* et Noura* dépose un recours au TAF contre la décision du SEM. En avril 2021, le SEM annule sa décision de NEM Dublin pour le second fils et sa famille, qui reçoivent une admission provisoire. En juillet 2021, le TAF prononce les arrêts qui rejettent respectivement les recours de Moussa*, de Ehsan* et Noura* et de Romina* et Khaleel*.
Cas individuel — 22/12/2022

Débouté à deux reprises malgré des agressions homophobes attestées en Ukraine

Témoignage – Emir* quitte l’Ukraine en 2020 suite à des persécutions liées à son orientation sexuelle. En Suisse, sa demande d’asile est refusée par le SEM et son recours rejeté par le TAF. Il repart en Ukraine, où il subit de nouvelles violences. Revenu en Suisse, sa demande d’asile essuie le même refus des autorités.