Pour le Tribunal fédéral, les subsides d’assurance-maladie ne sont pas de l’aide sociale

Dans un arrêt du 8 juillet 2020 (2C_987/2019), le Tribunal fédéral approuve l’autorisation de séjour d’une ressortissante brésilienne dont le fils, de nationalité portugaise, est scolarisé en Suisse. La recourante s’était vue refuser l’octroi d’une autorisation de séjour ALCP par le SEM, confirmé par le TAF, au motif que ses revenus n’étaient pas suffisants.

Le Tribunal fédéral rappelle tout d’abord l’application de la jurisprudence Zhu et Chen de la Cour de justice de l’Union européenne, ainsi que sa portée : tout ressortissant mineur en bas âge d’un Etat membre de l’Union européenne qui est couvert par une assurance-maladie appropriée et qui est à la charge d’un parent, lui-même ressortissant d’un Etat tiers, dont les ressources sont suffisantes pour que le premier ne devienne pas une charge pour les finances publiques de l’Etat membre d’accueil a droit a une autorisation de séjour de durée indéterminée. Le parent qui a effectivement la garde de l’enfant doit également être mis au bénéfice d’une autorisation de séjour, afin de pouvoir rester auprès de lui dans l’Etat d’accueil.

le Tribunal fédéral précise ensuite, contredisant l’analyse du TAF, que les personnes qui bénéficient d’une réduction des primes d’assurance-maladie grâce aux subsides ne doivent pas être considérées comme recourant à l’aide sociale. Il ajoute qu’un tel raisonnement est disproportionné et que, puisque le montant des subsides diffère entre les cantons, leur assimilation à de l’aide sociale conduirait à des différences de traitement difficilement justifiables. Enfin, il requiert de prendre en compte les subsides de l’assurance-maladie dans le calcul des ressources suffisantes. Dans le présent cas, le revenu de la recourante était donc suffisant et une autorisation de séjour ALCP aurait dû lui être accordée en vertu de l’art. 6 ALCP, en lien avec l’art. 24 Annexe I ALCP.

Sources : ATF 2C_987/2019 du 8 juillet 2020 ; CJCE, arrêt Zhu et Chen C-200/02 du 19 octobre 2004 ; Accord entre la Confédération suisse, d’une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d’autre part, sur la libre circulation des personnes du 21 juin 1999 , dit ALCP.

Cas relatifs

Cas individuel — 17/06/2025

Un couple européen est menacé de renvoi car il recourt partiellement à l’aide sociale

Andrea* et son épouse Lidia*, ressortissant·es italien·es arrivé·es en Suisse en 2022, se voient menacés de retrait de leur permis B obtenu sur la base de l’Accord sur la libre circulation des personnes (ALCP), au motif qu’il et elle recourent parfois à l’aide sociale en complément de leur revenu. Ce, bien qu’Andrea* travaille depuis août 2024 avec un contrat à durée indéterminée, et effectue un minimum de 30 heures par semaine pour un salaire mensuel d’environ 2'800 CHF. Avec l’appui d’un mandataire, le couple rappelle au Service de la population que la qualité de travailleur·se s’obtient à la simple condition d’«accomplir pendant un certain temps, en faveur d’une autre personne et sous la direction de celle-ci, des prestations en contrepartie desquelles elle touche une rémunération». Par ailleurs, le Tribunal fédéral a reconnu la qualité de travailleur à une personne qui percevait un revenu mensuel net d’environ 2'500.-. Il faudra encore présenter au SPoMi trois nouvelles fiches de salaire d’Andrea* ainsi que les preuves des allocations liées à sa seconde paternité pour que les autorités classent l’affaire.
Cas individuel — 12/05/2025

Européen, il fait les frais d’une mauvaise application du cadre légal par les autorités d’immigration

Nino* est originaire du Brésil. En février 2023, il fait l’objet d’une condamnation pour séjour illégal et reçoit une interdiction d’entrée en Suisse (IES), valable jusqu’en janvier 2025. En octobre 2023, Nino* est naturalisé italien. Désormais citoyen de l’UE et au bénéfice d’un contrat de travail, il dépose une demande de permis de séjour. Mais les autorités genevoises refusent en raison de son revenu qu’elles jugent insuffisant et de son IES encore valable. Nino* fait opposition en arguant que l’accord sur la libre circulation (ALCP) ne pose aucune exigence en termes de revenu et qu’en tant que ressortissant européen son IES doit être levée. En février 2025, le SEM lui octroie finalement un permis B.
Cas individuel — 18/03/2025

Des emplois temporaires et aux revenus trop bas conduisent à une décision de renvoi

Luana*, originaire du Portugal, arrive en Suisse en avril 2018. Elle obtient une autorisation de séjour de courte durée (permis L) et cumule les emplois temporaires à faibles taux d’activité. En 2020, elle dépose une demande d’autorisation de séjour (permis B). Le Service de la population du canton de Vaud (SPOP) la refuse. Luana* dépose un recours auprès du Tribunal cantonal (TC), argumentant qu’elle a acquis la qualité de travailleuse Elle précise que son fils, également en Suisse au bénéfice d’une autorisation de séjour de courte durée, est prêt à la prendre en charge financièrement. En juin 2024, Le TC rend son arrêt. Il conclut que les activités de Luana* présentent un nombre d’heures trop faible avec des revenus trop bas pour être qualifiées de réelles et effectives, et lui dénie dont la qualité de travailleuse. Il ajoute que les revenus de son fils n’étant pas stables, sa prise en charge n’est pas assurée. Partant, le TC rejette le recours de Luana* et confirme la décision de son renvoi.
Cas individuel — 27/11/2019

Née suisse, une Belge risque le renvoi alors qu’elle travaille à mi-temps

Née suisse, « Catherine », 63 ans, a perdu sa nationalité en se mariant avec un ressortissant belge. De retour en Suisse depuis 14 ans, elle se voit aujourd’hui refuser le renouvellement de son permis de séjour, aux motifs qu’elle a bénéficié de l’aide sociale et que son travail est considéré comme une activité « accessoire », contrairement à ce que dit la jurisprudence européenne. Si elle avait été un homme, elle n’aurait jamais perdu sa nationalité.