L’OSAR recommande à la Suisse de renoncer à transférer les requérant∙e∙s d’asile en Italie, en particulier les personnes vulnérables

L’OSAR s’est rendue à Rome et à Milan en septembre dernier pour évaluer la situation des personnes requérantes d’asile renvoyées de Suisse vers ce pays, conformément au règlement Dublin. Dans son rapport qui détaille les conditions actuelles d’accès à la procédure d’asile et d’accueil en Italie et fait un état des lieux de la jurisprudence sur les transferts vers ce pays, il est démontré que l’accès aux besoins de base (nourriture, hygiène, logement) n’y est pas garanti et que les conditions d’accueil n’atteignent pas les standards minimaux juridiquement établis.

Parmi les effets du décret dit « Salvini », entré en vigueur en octobre 2018, on peut mentionner le fait que seules les personnes requérantes d’asile mineures non accompagnées peuvent aujourd’hui bénéficier d’un logement adéquat. Les personnes vulnérables, qui avaient le droit d’être logées dans des centres d’accueil spécifiques, n’y ont désormais plus accès. La principale solution d’hébergement des requérant∙e∙s d’asile aujourd’hui en Italie est le recours aux centres d’accueil d’urgence qui n’ont pas d’infrastructures adéquates en matière de soins médicaux, d’assistance psychologique et d’assistance sociale.

En outre, les personnes qui ont quitté leur centre pendant 72 heures sans notification préalable se voient révoquer leur droit au logement. Cela concerne particulièrement les requérant·e·s d’asile parti·e·s demander l’asile dans un autre Etat Dublin et qui ont été renvoyés en Italie

Sources : OSAR, « Italie : une prise en charge toujours insuffisante », 23.09.2019 ; OSAR, « Situation actuelle pour les personnes requérantes d’asile en Italie », 8.05.2019. 

Voir également : ODAE romand, « Dublin : risque de violation des droits fondamentaux des personnes vulnérables renvoyées en Italie », brève, 20.12.2018 ; OSAE romand, « Des associations dénoncent le renvoi de personnes vulnérables au nom du règlement Dublin », brève, 15.11.18 ; ODAE romand, « Le comité de l’ONU contre la torture empêche un renvoi Dublin vers l’Italie », 11.09.18.

Cas relatifs

Cas individuel — 04/03/2025

Renvoi Dublin vers la Croatie: le TAF reconnait que le SEM fait fi de l’avis des médecins

Le SEM refuse d’entrer en matière sur la demande d’asile de Ahmad*, originaire d’Afghanistan, au motif que la Croatie serait l’État responsable de sa prise en charge (art.31a LAsi ; règlement Dublin III). Ahmad* passe les six mois de son délai de renvoi Dublin dans l’angoisse, connait plusieurs épisodes d’hospitalisation notamment en raison d’une tentative de suicide. Début novembre 2023, Ahmad* demande au SEM d’entrer en matière sur sa demande d’asile au vu du fait que le délai de son transfert est échu. Mais le SEM refuse et Ahmad* dépose un recours auprès du TAF. Dans son arrêt du 21 juin 2024, le tribunal constate qu’Ahmad* a été hospitalisé à plusieurs reprises, ce dont le SEM avait été dument informé, et qu’au vu des motifs d’hospitalisation, il ne saurait être retenu contre lui de s’être fait hospitaliser volontairement pour échapper au renvoi. Le TAF estime qu’ «en laissant entendre que le recourant aurait provoqué ses hospitalisations pour empêcher son transfert en Croatie, le SEM fait fi des avis des médecins ayant ordonné celle-ci». Enfin, le tribunal souligne que rien n’indique qu’Ahmad* ait tenté d’échapper aux autorités, puisqu’il a été informé de sa dernière convocation après son retour de l’hôpital. Il admet le recours et annule la décision du SEM de décembre 2023 en l’invitant à reconnaître la responsabilité de la Suisse pour examiner la demande d’asile d’Ahmad*.
Cas individuel — 24/08/2009

Malgré toutes les preuves de persécution il n’obtient pas l’asile

Menacé de mort par des groupes armés, « Salim », ancien interprète en Irak pour l'armée américaine, fuit son pays pour gagner la Suède, puis la Suisse. Conformément à la logique des Accords de Dublin, la Suisse refuse d’entrer en matière sur sa demande d’asile, malgré les documents qui attestent des dangers encourus, et ordonne son renvoi vers la Suède.
Cas individuel — 20/10/2008

Europe de Dublin : une pente glissante même pour les « vrais » réfugiés

Menacé par des milices islamistes parce qu’il collabore avec l’armée américaine en Irak en tant que traducteur, « Bachir » gagne la Suisse après avoir parcouru l’Europe en quête d’asile. Sans nier ses dires mais en appliquant la logique des accords de Dublin, la Suisse le renvoie vers la Suède, qui veut le renvoyer vers la Grèce, où il risque un renvoi vers l’Irak.