Le TAF impose des conditions plus strictes pour les renvois vers la Grèce

Suisse, 27.04.2022 – Dans un arrêt du 28 mars 2022 (E-3427/2021, E-3431/2021), le TAF a précisé sa jurisprudence concernant le renvoi des personnes bénéficiant d’une protection internationale en Grèce. Le Tribunal considère l’exécution des renvois vers ce pays généralement exigible, mais impose des restrictions et un examen approfondi de la situation pour les familles avec enfants, les personnes mineures non accompagnées et les personnes souffrant d’une maladie grave. Concernant les deux dernières catégories, le TAF précise que l’exécution du renvoi est en principe inexigible, «à moins qu’il n’existe des conditions particulièrement favorables».

Les juges constatent en effet qu’en Grèce, les bénéficiaires d’une protection internationale connaissent des difficultés dans l’accès à un logement, aux soins, au système de sécurité sociale, au marché du travail régulier et à la formation.

Sources: TAF, «Critères plus stricts pour les transferts vers la Grèce», communiqué, 27.04.2022.

Voir également: ODAE romand, «Déboutée de l’asile, une famille se bat pour rester unie et ne pas être renvoyée», cas 383, 02.05.2021; ODAE romand, «Des renvois qui pourraient mettre en péril les droits humains», brève, 21.03.2021; Sophie Malka, «La Grèce, un État tiers « sûr » pour la Suisse?», asile.ch, 21.02.2022.

Cas relatifs

Cas individuel — 17/03/2025

Le TAF réfute la validité du test osseux pour déterminer la majorité d’un mineur non accompagné

Michael* dépose une demande d’asile en Suisse en 2016. Il annonce être mineur, mais ne possède ni carte d’identité ni passeport. Remettant en doute sa minorité, le SEM ordonne une analyse osseuse, suite à laquelle il est considéré majeur. Le SEM demande alors à l’Italie sa reprise en charge au nom des accords Dublin III. Mais l’Italie refuse, car elle considère précisément que Michael* est mineur. Le SEM entre alors en matière sur sa demande d’asile, mais le traite comme un adulte, sans adopter les mesures nécessaires à l’audition d’un enfant. En novembre 2018, il rejette sa demande d’asile et ordonne son renvoi. Saisi par un recours de Michael*, le TAF rappelle que pour les personnes âgées de 16 ans ou plus, un test osseux ne forme qu’un faible indice qui ne permet pas de réfuter la minorité, et que le SEM est tenu de procéder à une appréciation globale de tous les éléments à disposition. Le TAF reconnaît ainsi que l’appréciation du SEM de l’âge de Michael* est arbitraire, il annule la décision et lui renvoie la cause pour une nouvelle décision.
Cas individuel — 16/01/2024

Persécuté pour des motifs politiques, les autorités suisses estiment pourtant le renvoi possible

Seymur* vient d’Azerbaïdjan, où il connait des persécutions liées à ses opinions politiques. Il demande l’asile en Suisse, qui refuse et ordonne le renvoi, malgré les intimidations que sa famille subit toujours.
Cas individuel — 01/01/2024

Harcelée en Croatie, une famille est menacée d’y être renvoyée

En 2019, Romina* et Khaleel* quittent l’Afghanistan avec leur fille (Emna*), encore mineure et leurs trois fils majeurs. Ils demandent l’asile en Suisse en octobre 2020, après être passé∙es par la Croatie. La famille raconte avoir tenté de passer la frontière entre la Bosnie et la Croatie à plus de 15 reprises, avoir été arrêté∙es par les autorités croates puis maltraité·es, volé·es, déshabillé·es et frappé·es. En février 2020, le SEM rend une décision NEM Dublin. Le mandataire d’Ehsan* et Noura* dépose un recours au TAF contre la décision du SEM. En avril 2021, le SEM annule sa décision de NEM Dublin pour le second fils et sa famille, qui reçoivent une admission provisoire. En juillet 2021, le TAF prononce les arrêts qui rejettent respectivement les recours de Moussa*, de Ehsan* et Noura* et de Romina* et Khaleel*.
Cas individuel — 15/12/2022

Homme trans ayant fui la Syrie, le SEM rejette sa demande d'asile au motif qu'il pourrait revenir à un rôle social féminin

Keyan*, homme trans syrien d’origine kurde, demande l’asile en Suisse en octobre 2015 en raison, notamment, de persécutions liées à son orientation sexuelle et son identité de genre. Sa requête est rejetée en février 2019 par le SEM qui estime qu’il pourrait revenir à un rôle social féminin après son retour en Syrie, notamment en dissimulant sa mastectomie effectuée en Suisse et en vivant secrètement ses relations amoureuses. Saisi par Keyan, le TAF casse la décision du SEM en juillet 2022 et ordonne que l’asile lui soit octroyé.