Une personne au bénéfice de l’admission provisoire peut se prévaloir du droit au respect de la vie familiale

Dans un arrêt de décembre 2017 (E-6457/2014) le TAF a admis le recours d’un réfugié érythréen, frappé d’une décision de renvoi vers l’Italie. L’homme avait déposé une demande d’asile en Suisse en 2014 pour résider auprès de sa femme, détentrice d’une admission provisoire. Le SEM avait refusé d’entrer en matière, au motif que le recourant avait déjà obtenu l’asile en Italie (art. 31a al. 1 let. a LAsi). Par ailleurs, son épouse étant au bénéfice de l’admission provisoire, elle ne disposait pas d’un droit de présence assuré en Suisse, et ne pouvait par conséquent pas se prévaloir du droit au respect de la vie familiale (art. 8 al. 1 CEDH). Le TAF a contredit le SEM sur ce point, rappelant que le TF avait déjà tempéré cette condition. Dans certaines circonstances, la situation familiale des intéressés doit ainsi primer sur la situation du point de vue du droit d’asile ou des étrangers. Dans le cas d’espèce, il a par ailleurs retenu l’existence d’une relation étroite et effective entre les époux, qui avaient certes été séparés par la fuite mais formaient un couple avant leur départ d’Erythrée et avaient des enfants communs. L’intérêt supérieur de l’enfant a également été pris en compte par le Tribunal. Dans une situation proche de celle-ci, documentée par l’ODAE romand (cas « Awat »), le TAF avait déjà reconnu l’application de l’art. 8 CEDH mais nié l’effectivité de la relation familiale. Il était par ailleurs resté muet sur l’intérêt supérieur de l’enfant. Le mari et père avait alors été renvoyé de force vers l’Italie.

Sources : arrêt E-6457/2014 du 14 décembre 2017 (signalé par l’association elisa-asile) ; voir également le cas « Awat » et la page sur la thématique de l’admission provisoire.

Cas relatifs

Cas individuel — 10/09/2024

Un couple avec enfant doit se battre pour se voir reconnaître son droit au mariage et au regroupement familial

Kayden* est originaire d’Angola et arrive en Suisse à l’âge de 5 ans. Jusqu’en 2015, il bénéficie d’un permis B, qu’il perd en 2016 suite à plusieurs infractions pénales. Kayden* a un fils né en 2014. Il se met en ménage avec Valérie, ressortissante suisse. En 2021, Valérie* est enceinte et le couple fait une demande d’autorisation de séjour pour Kayden* en vue de leur mariage, mais le Service de la population du canton de Fribourg (SPoMI) refuse la demande et prononce le renvoi de Suisse. La décision est motivée par le fait que Kayden* a transgressé à plusieurs reprises la loi, que son intégration économique serait un échec et que sa relation avec son fils se limiterait à l’exercice d’un droit de visite. Kayden* dépose un recours contre cette décision au près du Tribunal cantonal (TC). Le couple devra attendre jusqu’en octobre 2022 pour que le TC admette le recours de Kayden*. Le TC reconnait que rien ne permet de douter des intentions matrimoniales des fiancé·es et qu’un renvoi en Angola priverait les enfants du lien avec leur père. Il considère en outre qu’il serait disproportionné d’exiger le retour du recourant en Angola, pays qu’il a quitté à l’âge de cinq ans et qu’il ne connait pas, pour revenir en Suisse une fois le mariage conclu. Le TC annule donc la décision du SPoMI et l’invite à délivrer à Kayden* une autorisation de séjour en vue du mariage.
Cas individuel — 27/05/2016

Un père arraché à son épouse enceinte et ses enfants

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Après 20 ans en Suisse, « Houria » se voit réattribuer un statut précaire

« Houria » et sa fille mineure voient leur permis B remplacé, après dix années, par une admission provisoire. Le Tribunal cantonal vaudois, qui reconnaît les efforts d’« Houria » pour trouver un emploi, estime néanmoins que sa détresse psychologique et l’incapacité totale de travailler qui en résulte ne justifient pas sa dépendance à l’aide sociale.
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La législation l'empêche de revoir sa sœur, après 12 ans d’exil

Admise provisoirement depuis 1995, "Danica" se voit refuser le visa de retour dont elle a besoin pour quitter la Suisse et y revenir. Elle voulait revoir sa sœur, qu’elle n’a pas revue depuis plus de 10 ans, mais la législation, durcie en 2004, ne le permet pas.