Réfugiés mineurs traités comme des adultes : la Société suisse de pédiatrie dénonce les examens médicaux de détermination de l’âge

La Société suisse de pédiatrie (SSP) publie une prise de position contre les examens pratiqués par les médecins, sur demande des autorités, pour déterminer l’âge des requérants d’asile. Les auteurs rappellent qu’aucune méthode scientifique ne permet d’établir avec certitude l’âge d’un jeune qui aurait entre 15 et 20 ans. Or, une erreur dans cette estimation a des conséquences sociales et légales importantes (accès à une formation ou à la protection d’un tuteur, hébergement, renvois sans garanties de prise en charge etc.). Pour la SSP, ces examens (osseux, physiques ou dentaires) ne sont pas compatibles avec la déontologie médicale. En effet, celle-ci veut que tout examen poursuive un but d’amélioration de la santé et se fasse avec le consentement de la personne et à l’aide d’une méthode validée et sans danger. Partant, la SSP « recommande à ses membres et à tout médecin sollicité de ne pas participer à la détermination de l’âge des jeunes requérants d’asile et de prendre position dans ce sens auprès des institutions cantonales en charge de la migration. »

La reconnaissance de la minorité représente un enjeu dans le cadre de la procédure d’asile et fait l’objet de nombreux recours. Le mois dernier, le quotidien neuchâtelois l’Express rapportait le cas d’un jeune que les autorités n’ont pas reconnu comme mineur et qui a été incarcéré avec des adultes en vue de son renvoi. C’est finalement par vol spécial qu’il a été expulsé vers l’Espagne, pays responsable de traiter sa demande d’asile selon le Règlement Dublin. Si sa minorité, attestée par un extrait de naissance et un certificat psychiatrique, avait été retenue, il aurait pu rester en Suisse pour le traitement de sa demande d’asile puisque les renvois Dublin ne s’appliquent pas aux mineurs non-accompagnés.

L’ODAE romand a aussi rapporté le cas d’« Imran », qui a été logé avec des adultes, n’a pas pu aller à l’école et a frôlé un renvoi vers l’Afghanistan avant qu’un recours au TAF ne pousse l’administration fédérale à revenir sur sa décision et à le reconnaitre comme mineur. Dans la pratique, le fardeau de la preuve de l’âge repose sur les requérants, ce qui est problématique lorsqu’il s’agit de personnes vulnérables. Au vu des conséquences, ne faudrait-il pas considérer un jeune comme étant mineur dès lors qu’il y a une probabilité qu’il le soit ?

Sources : Article de la Société suisse de pédiatrie du 24.05.2017, paru dans le Bulletin des médecins suisses N°2017/2122 ; Lettre à Simonetta Sommaruga pour le jeune Guinéen Alphonse, L’Express, 15.04.2017

Cas relatifs

Cas individuel — 24/07/2025

Reconnue invalide, elle reçoit une révocation d’autorisation de séjour et un refus de regroupement familial

Ximena* arrive en Suisse en septembre 2019. Elle trouve un emploi à 100%, et obtient, sur cette base, un permis B UE/AELE. Peu de temps après, elle dépose une demande de regroupement familial en faveur de son mari et de ses fils, âgés respectivement de 12 et 5 ans. En mars 2020, par suite d’un AVC, elle se retrouve en incapacité totale de travail. Malgré la reconnaissance de son invalidité par l’AI qui lui octroie une rente, les autorités migratoires lui refusent le droit de demeurer au motif que Ximena n’avait pas résidé en Suisse au moins deux ans avant la survenance de son invalidité. Son permis est ainsi révoqué et la demande de regroupement familial déposée en faveur de ses enfants des années plus tôt est refusée (l’époux est entre-temps retourné en Espagne suite à leur divorce). Tous les trois doivent quitter la Suisse.
Cas individuel — 23/04/2013

L'ODM renonce au transfert en France d'une adolescente victime de prostitution

« Ayala », ressortissante d’un pays d’Afrique de l’Ouest âgée de 15 ans, est victime d’un réseau de prostitution à son arrivée en France en 2010. Parvenant à s’enfuir, elle dépose une demande d’asile en Suisse. L’ODM, qui rend une première décision de NEM, décide finalement de renoncer au transfert et entame une procédure nationale.
Cas individuel — 04/05/2012

Renvoi Dublin imminent d’une famille
qui risque des mauvais traitements

En 1998, « Arjun » et « Revathi » fuient des persécutions au Sri Lanka et parviennent à s’établir en Grèce. Durant plusieurs années, ils y subissent des humiliations et attaques racistes répétées. Lors d’une de ces agressions, « Arjun » perd un doigt. La famille dépose alors une demande d’asile en Suisse. L’ODM puis le TAF ordonnent leur renvoi en Grèce, où ils risquent d’autres mauvais traitements, voire un retour forcé au Sri Lanka.