Procédures d’asile accélérées: une prise en compte insuffisante de l’état de santé des requérant∙e∙s

Depuis le mois d’août 2018, dans le cadre de la nouvelle procédure d’asile, le TAF a renvoyé une vingtaine d’affaires au SEM pour compléments d’instruction. En cause : une prise en compte insuffisante de l’état de santé des requérant.e.s et des manquements dans l’encadrement médical des centres fédéraux (CFA) de Perreux et de Chevrilles.

Absence de traduction ou traduction par ordinateur lors des visites à l’infirmerie, transferts inopinés entre les différents centres fédéraux qui interrompent les investigations médicale, grandes difficultés à avoir accès à un∙e médecin pour les requérant∙e∙s ou à obtenir les certificats médicaux pour la représentation juridique, décisions prises avant un avis médical complet, les différents arrêts font état de problèmes récurrents.

Un article sur la question a été rédigé par le coordinateur de l’ODAE romand et publié dans la revue Vivre Ensemble de juin 2019.

Source : Vivre ensemble 173 / juin 2019, article en ligne depuis le 29.07.2019 

Liste des arrêts du TAF (mise à jour le 31.08.2019) : D-4515/2018 du 20.08.2018 ; D-5170/2018 du 26.09.2018 ; E-4498/2018 du 19.11.2018; E-6100/2018 du 6.12.2018 ; E-5835/2018 du 17.12.2018 ; D-6271/2018 du 18.12.2018 ; D-835/2019 du 6.03.2019 ; E-1376/2019 du 28.03.2019 ; E-1687/2019 du 16 avril 2019 ; D-1861/2019 du 26 avril 2019 ; E-1953/2019 du 2 mai 2019 ; D-2006/2019 du 6 mai 2019 ; D-1954/2019 du 13 mai 2019 ; E-2327/2019 du 20 mai 2019 ; E-2264/2019 du 6 juin 2019 ; E-2307/2019 du 6 juin 2019 ; D-2991/2019 du 25.06.2019 ; E-3262/2019 du 04.07.2019 ; F-3595/2019 du 18.07.2019; F-3723/2019 du 24.07.2019 ; F-3791/2019 du 31.07.2019 ;  F-3393/2019 du 09.08.2019 ; F-4049/2019 du 19.08.2019.

Cas relatifs

Cas individuel — 01/04/2025

Prolongation de délai Dublin: le TAF casse une décision du SEM qu’il juge simplificatrice et décontextualisée

Nadir*, originaire d’Afghanistan, arrive en Suisse en 2023 et dépose une demande d’asile. Le SEM refuse d’entrer en matière et lui signifie une décision de renvoi Dublin. En janvier 2024, le SEM obtient une prolongation du délai de transfert de Nadir* au motif que ce dernier se serait opposé à son renvoi: lorsque l’autorité cantonale a tenté d’arrêter Nadir* dans ses locaux afin de le renvoyer en Croatie, ce dernier est accusé de s’être tapé la tête contre un mur avant d’être hospitalisé. Nadir* recourt contre la décision auprès du TAF. Le tribunal admet le recours, soulignant que Nadir* s’est présenté tous les lundis auprès du service de la population de façon parfaitement collaborative. Il reconnait le caractère involontaire de son hospitalisation, laquelle a été ordonnée par un médecin. Le TAF estime que le SEM propose une lecture «simplificatrice et décontextualisée» qui fait abstraction de la réalité médicale.
Cas individuel — 04/03/2025

Renvoi Dublin vers la Croatie: le TAF reconnait que le SEM fait fi de l’avis des médecins

Le SEM refuse d’entrer en matière sur la demande d’asile de Ahmad*, originaire d’Afghanistan, au motif que la Croatie serait l’État responsable de sa prise en charge (art.31a LAsi ; règlement Dublin III). Ahmad* passe les six mois de son délai de renvoi Dublin dans l’angoisse, connait plusieurs épisodes d’hospitalisation notamment en raison d’une tentative de suicide. Début novembre 2023, Ahmad* demande au SEM d’entrer en matière sur sa demande d’asile au vu du fait que le délai de son transfert est échu. Mais le SEM refuse et Ahmad* dépose un recours auprès du TAF. Dans son arrêt du 21 juin 2024, le tribunal constate qu’Ahmad* a été hospitalisé à plusieurs reprises, ce dont le SEM avait été dument informé, et qu’au vu des motifs d’hospitalisation, il ne saurait être retenu contre lui de s’être fait hospitaliser volontairement pour échapper au renvoi. Le TAF estime qu’ «en laissant entendre que le recourant aurait provoqué ses hospitalisations pour empêcher son transfert en Croatie, le SEM fait fi des avis des médecins ayant ordonné celle-ci». Enfin, le tribunal souligne que rien n’indique qu’Ahmad* ait tenté d’échapper aux autorités, puisqu’il a été informé de sa dernière convocation après son retour de l’hôpital. Il admet le recours et annule la décision du SEM de décembre 2023 en l’invitant à reconnaître la responsabilité de la Suisse pour examiner la demande d’asile d’Ahmad*.
Cas individuel — 25/01/2024

Javier* et Lilian*, expulsé·es suite à un accident de travail sur un chantier

Cas 455 Victime d’un accident de travail, Javier* est reconnu invalide par l’AI. Les autorités ordonnent cependant son renvoi de Suisse ainsi que celui de son épouse. Elles ne lui reconnaissent pas le droit de demeurer en Suisse, considérant qu’il n’avait pas la qualité de travailleur au moment de son accident puisqu’il ne totalisait pas une année de travail en Suisse. La lenteur de la procédure et la décision d’expulsion impacte la santé mentale de Javier* qui souffre déjà d’autres problème de santé. Son épouse Lilian* cumule des emplois de nettoyages peu rémunérés et instables mais les autorités leur refusent un permis de séjour sur cette base, arguant qu’il s’agit d’«activités marginales et accessoires».
Cas individuel — 16/01/2024

Persécuté pour des motifs politiques, les autorités suisses estiment pourtant le renvoi possible

Seymur* vient d’Azerbaïdjan, où il connait des persécutions liées à ses opinions politiques. Il demande l’asile en Suisse, qui refuse et ordonne le renvoi, malgré les intimidations que sa famille subit toujours.