ONU : le régime d’admission provisoire n’est pas raciste,
mais entraîne des « conséquences néfastes »

Le Comité sur l’élimination de la discrimination raciale (CERD) des Nations Unies vient de se prononcer sur la plainte déposée par A. M. M., Somalien titulaire d’une admission provisoire en Suisse depuis maintenant 15 ans. Résidant dans le canton de Vaud, A. M. M. reçoit une aide sociale de 12,50 francs par jour depuis 1999. Il énumère un nombre incalculable de tentatives avortées d’améliorer sa situation socio-professionnelle. Mais dans toutes ces démarches, ainsi que dans sa vie quotidienne, il allègue subir de fortes discriminations en matière d’emploi, de formation, de soins médicaux, de liberté de mouvement et de protection de sa vie privée.

Le Comité constate que les difficultés rencontrées par A. M. M. posent problème et rappelle que l’État suisse « a lui-même reconnu les conséquences néfastes du statut de l’admission provisoire sur les domaines essentiels de l’existence de cette catégorie de non-ressortissants qui, pour certains, demeurent de manière pérenne dans une situation qui devrait rester provisoire ». Cependant, ces difficultés ne constituent pas une violation de la Convention, car elles ne se basent manifestement pas sur son origine ou sa nationalité mais plutôt sur son statut d’étranger admis à titre provisoire.

Le CERD recommande tout de même à la Suisse de « revoir sa réglementation relative au régime de l’admission provisoire, afin de limiter autant que possible les restrictions à la jouissance et à l’exercice des droits fondamentaux, plus particulièrement les droits relatifs à la liberté de circulation, surtout lorsque ce régime se prolonge dans le temps. »

Source : CERD, A. M. M. c. Suisse (Communication n°50/2012), CERD/C/84/D/50/2012, 11 mars 2014.

Cas relatifs

Cas individuel — 30/10/2025

En Suisse depuis 10 ans et chargée seule de trois enfants dont l’une en situation de handicap, sa demande de permis B est préavisée négativement au motif qu’elle ne travaille pas

Imène* arrive en Suisse en 2014, avec son époux et leurs deux enfants âgés de 4 et 6 ans. La famille reçoit une admission provisoire (permis F). La dernière enfant du couple naît en 2015 et est rapidement diagnostiquée d’un trouble de développement général et d’un TSA. Imène* se sépare de son mari en raison de violences conjugales. Celui-ci refusant de maintenir des liens avec sa famille, Imène* se retrouve seule en charge des 3 enfants. En 2024, après dix ans passés en Suisse, elle dépose une demande de transformation de permis F en B pour elle et ses enfants, auprès du Service de la population de son canton. En mai 2025, l'autorité cantonale l’informe de son intention de refuser la demande. L’autorité considère que son intégration ne serait pas réussie, en raison de sa dépendance à l’aide sociale. Le fait qu’Imène* doivent s’occuper seule de trois enfants dont la cadette nécessite une attention constante et rapprochée n’est aucunement pris en compte. La procédure est en cours.
Cas individuel — 17/03/2015

Admise « provisoirement » depuis 14 ans, elle obtient enfin un permis B

Titulaire d’un permis F, « Sanija », veuve suite à la guerre d’ex-Yougoslavie, à la santé fragile, essuie trois refus de se faire délivrer un permis B en raison d’un manque d’intégration. Ce n’est que grâce à un solide argumentaire de sa mandataire que les autorités acceptent de stabiliser son séjour en Suisse, après quatorze ans, par un titre de séjour.
Cas individuel — 13/01/2015

Admis « provisoirement » depuis 12 ans il ne peut pas voir sa famille en Allemagne

Titulaire d’un permis F depuis 12 ans, « Seyoum » demande un « visa de retour », document officiel nécessaire pour rendre visite à sa famille en Allemagne et revenir en Suisse. L’ODM refuse au motif qu’il dépend de l’aide sociale. « Seyoum » est comme enfermé en Suisse.
Cas individuel — 03/07/2013

Après 20 ans en Suisse, « Houria » se voit réattribuer un statut précaire

« Houria » et sa fille mineure voient leur permis B remplacé, après dix années, par une admission provisoire. Le Tribunal cantonal vaudois, qui reconnaît les efforts d’« Houria » pour trouver un emploi, estime néanmoins que sa détresse psychologique et l’incapacité totale de travailler qui en résulte ne justifient pas sa dépendance à l’aide sociale.