La Suisse condamnée à l’ONU pour une décision de renvoi d’un enfant vers la Bulgarie

06.10.2021 – Suite à un recours du Centre suisse pour la défense des migrants (CSDM) auprès du Comité des droits de l’enfant de l’ONU, la Suisse a été condamnée pour une dizaine de violations des articles de la Convention relative aux droits de l’enfant (M.K.A.H. c. Suisse).

L’affaire concerne l’expulsion d’un réfugié mineur palestinien, originaire de Syrie, vers la Bulgarie où il avait obtenu une protection subsidiaire. À l’âge de 11 ans, après avoir séjourné près d’un an en Bulgarie sans aucune mesure d’intégration, il avait quitté le pays avec sa mère pour la Suisse, où se trouvaient des membres de leur famille élargie. Le SEM puis le TAF avaient estimé qu’en application des accords de réadmission Suisse – Bulgarie, le renvoi était licite et exigible.

Dans sa décision, le Comité des droits de l’enfant juge que la Suisse n’a pris en compte ni l’état de l’enfant, ni les conditions de réception en Bulgarie, ni le réseau familial de l’enfant et de sa mère en Suisse. Le comité conclut, entre autres, à une violation de l’art. 37 CDE (non-refoulement), du droit à la réadaptation, en l’occurrence d’un enfant traumatisé par la guerre en Syrie (art. 39 CDE), ainsi qu’à une violation du respect de sa vie privée et familiale (art. 16 CDE). Concernant la notion de «famille», le Comité note qu’elle «recouvre toute la série de structures permettant d’assurer la prise en charge, l’éducation et le développement des jeunes enfants, dont la famille nucléaire, la famille élargie et d’autres systèmes traditionnels ou modernes fondés sur la communauté».

Sources: CDE, décision M.K.A.H. c. Suisse, Communication n° 95/2019 du 6 octobre 2021; CSDM, «La Suisse épinglée pour 10 violations de la Convention relative aux droits de l’Enfant dans le cas de l’expulsion d’un réfugié mineur vers la Bulgarie», communiqué, 08.10.2021; Elisa Turtschi, «La Suisse condamnée par l’ONU pour sa décision d’expulsion d’un réfugié mineur vers la Bulgarie», asile.ch, 13.01.2022.

Cas relatifs

Cas individuel — 10/04/2025

Des violences conjugales reconnues par un Centre LAVI sont jugées trop peu intenses par les tribunaux

Eja*, originaire d’Afrique de l’est, rencontre Reto*, ressortissant suisse, en 2019. Leur mariage est célébré en avril 2021 et Eja* reçoit une autorisation de séjour. L’année qui suit est marquée par des disputes et des violences au sein du couple, et une première séparation de courte durée. En février 2023, Eja* consulte le Centre LAVI du canton, qui la reconnait victime d’infraction. En juillet, Eja* dépose une plainte pénale contre son époux pour harcèlement moral, rabaissements et injures, discrimination raciale et contraintes. En novembre 2023, Eja* dépose une deuxième plainte. Son médecin confirme des symptômes de stress émotionnel élevé. En février 2024, le SPoMi révoque l’autorisation de séjour d’Eja* et prononce son renvoi de Suisse, au motif que la durée effective de la communauté conjugale n’a pas dépassé trois ans. En août 2024, le Tribunal cantonal rejette le recours déposé par Eja*, au motif que l’intensité des violences psychologiques n’atteint pas le seuil exigé par la jurisprudence. Le Tribunal conclut à l’absence de raison personnelle majeure permettant de justifier le maintien de l’autorisation de séjour d’Eja*. Le Tribunal fédéral, dans son arrêt du 14 novembre 2024, confirme la décision du SPoMi et rejette le recours d’Eja*.
Cas individuel — 10/09/2024

Un couple avec enfant doit se battre pour se voir reconnaître son droit au mariage et au regroupement familial

Kayden* est originaire d’Angola et arrive en Suisse à l’âge de 5 ans. Jusqu’en 2015, il bénéficie d’un permis B, qu’il perd en 2016 suite à plusieurs infractions pénales. Kayden* a un fils né en 2014. Il se met en ménage avec Valérie, ressortissante suisse. En 2021, Valérie* est enceinte et le couple fait une demande d’autorisation de séjour pour Kayden* en vue de leur mariage, mais le Service de la population du canton de Fribourg (SPoMI) refuse la demande et prononce le renvoi de Suisse. La décision est motivée par le fait que Kayden* a transgressé à plusieurs reprises la loi, que son intégration économique serait un échec et que sa relation avec son fils se limiterait à l’exercice d’un droit de visite. Kayden* dépose un recours contre cette décision au près du Tribunal cantonal (TC). Le couple devra attendre jusqu’en octobre 2022 pour que le TC admette le recours de Kayden*. Le TC reconnait que rien ne permet de douter des intentions matrimoniales des fiancé·es et qu’un renvoi en Angola priverait les enfants du lien avec leur père. Il considère en outre qu’il serait disproportionné d’exiger le retour du recourant en Angola, pays qu’il a quitté à l’âge de cinq ans et qu’il ne connait pas, pour revenir en Suisse une fois le mariage conclu. Le TC annule donc la décision du SPoMI et l’invite à délivrer à Kayden* une autorisation de séjour en vue du mariage.
Cas individuel — 02/05/2021

Déboutée de l’asile, une famille se bat pour rester unie et ne pas être renvoyée

Arrivé en 2016 en Suisse, Yemane*, originaire d’Éthiopie, reçoit une décision de renvoi en novembre 2018. Asmarina*, originaire d’Érythrée, a vécu cinq ans en Grèce avec sa fille aînée, dans des conditions très précaires et sans accès à des soins pour son enfant, en situation de handicap physique. À cause de ces conditions invivables, elle est contrainte de quitter la Grèce et demande l’asile en Suisse. Ayant obtenu l’asile en Grèce, elle reçoit une décision de NEM de la part du SEM qui prononce son renvoi en novembre 2017. Asmarina* et Yemane* se rencontrent en Suisse et ont une fille en 2019. Au vu des différentes situations, la famille doit se battre pour ne pas être séparée entre plusieurs pays.
Cas individuel — 27/05/2016

Un père arraché à son épouse enceinte et ses enfants

« Awat » habitait à Genève avec son épouse « Mariame » enceinte de trois mois, et leurs deux filles, « Melete » et « Awatif ». Enfin réunie après un long périple et un exil forcé, cette famille se voit à nouveau séparée, cette fois par les autorités suisses : le père est renvoyé en Italie. Le Tribunal ne retient ni son droit à la vie familiale, ni l’intérêt supérieur de ses enfants à grandir auprès de leur père.