La communauté érythréenne dépose une pétition

Suisse, 10.11.2023 – Des membres de la communauté érythréenne en Suisse ont déposé une pétition munie d’environ 4’500 signatures, appelant à la suppression de l’obligation de se rendre à leur ambassade pour obtenir un passeport. La pétition a été remise à la Chancellerie fédérale. Les signataires rappellent qu’actuellement se rendre auprès de leur ambassade est nécessaire pour diverses démarches administratives, y compris l’autorisation de séjour ou la célébration d’un mariage, seules les personnes ayant le statut de réfugié·ex étant exemptées de cette obligation.

Les conditions strictes imposées par l’ambassade érythréenne sont au cœur des préoccupations. Pour obtenir un passeport, les individus doivent signer une «déclaration de repentance», reconnaissant avoir manqué à leurs obligations nationales et acceptant des sanctions. De plus, ils et elles sont confronté·exs à un «impôt de la diaspora» correspondant à 2% de leurs revenus et sont incité·exs à divulguer des informations sensibles pouvant mettre en danger leurs proches en Érythrée.

L’Association des médias érythréens de Suisse en collaboration avec le réseau Migrant Solidarity Network a lancé cette pétition. Les signataires estiment que l’obligation de se rendre à l’ambassade érythréenne crée une anxiété injuste pour les personnes migrantes et demandent aux autorités suisses d’adopter une approche plus flexible. Iels soulignent que d’autres moyens, tels qu’un acte de naissance, pourraient être utilisés pour établir l’identité sans avoir à passer par l’ambassade.

La situation touche particulièrement les migrant·exs ayant reçu une admission provisoire (permis F). Il s’agit d’un statut très précaire qui aujourd’hui concerne 3’000 personnes en Suisse: bien que reconnues comme ayant besoin de protection, elles n’ont pas le statut de réfugié·ex. Pour sortir de cette situation et obtenir un permis B après cinq ans de séjour, elles doivent se rendre à leur ambassade en Erythrée afin de demander un passeport.

Selon le SEM, l’absence de prise de contact avec les autorités du pays d’origine ne peut être exigée que des personnes pour lesquelles le SEM estime qu’elles font l’objet d’une persécution ciblée (donc, avec le statut de réfugié·ex). En outre, le SEM considère que la signature de la lettre de repentir n’indique pas un risque de persécution. Malgré les appels à la flexibilité et au changement de pratique, la question reste un point de tension entre les requérant·exs d’asile érythréen·nexs en Suisse et les autorités fédérales.

Sources: le Courrier, «Un passeport sous conditions», 09.11.2023.

Voir également: ODAE romand, «Labyrinthe administratif des ambassades suisses et entrave au regroupement familial», brève, 15.08.2023 ; ODAE romand, «Ambassades suisses: zones de non-droit?», Panorama, 08.2023.

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