Défaillances systémiques en Grèce: le TAF annule un transfert Dublin

Suisse, 27.06.2025 – A., ressortissant turc, demande l’asile en Suisse en juillet 2024. Le SEM constate que A. a formulé une demande de protection internationale en Grèce en janvier de la même année. A la demande du SEM, les autorités grecques ont admis la requête de reprise en charge de A. Le SEM notifie alors A. qu’il ne rentrera pas en matière sur sa demande d’asile et prononce son transfert vers la Grèce. A. recours auprès du TAF contre cette décision. 

Dans son arrêt, le TAF constate que des défaillances systémiques subsistent dans la procédure d’asile en Grèce (jurisprudence de la CourEDH notamment: M.S.S., H.T. et A.R.E.) et que le SEM n’a pas obtenu de garanties suffisantes pour procéder au renvoi. Le TAF demande au SEM d’établir pleinement les faits déterminants et actuels liés à la situation des personnes requérantes d’asile en Grèce. Il lui reproche également de ne pas avoir suffisamment instruit la situation personnelle du recourant, en particulier concernant un éventuel refoulement en chaîne vers la Turquie. Le recours est admis et l’affaire renvoyée au SEM pour réexamen.

Source: arrêt du TAF F-5298/2024 du 27 juin 2025.

Voir également: ODAE romand,”Renvois de femmes victimes de violences vers la Grèce et l’Italie : la Suisse condamnée par le CEDAW”, brève, 12.08.2025 ; ODAE romand,”La Grèce condamnée par la courEDH”, brève, 01.02.2025 ; ODAE romand, “Trop vulnérable pour être renvoyée en Grèce selon le TAF”, brève, 17.04.2024 ; ODAE romand,”Décès d’un jeune demandeur d’asile: la responsabilité directe des autorités suisses”, brève, 13.02.2024

Cas relatifs

Cas individuel — 15/10/2024

Le TF ordonne la reconnaissance du statut d’apatride pour un ressortissant kurde

Kurde de Syrie vivant en Suisse au bénéfice d’une admission provisoire (permis F), Aryian* dépose une demande de reconnaissance d’apatridie en 2015. Le SEM puis le TAF refusent sa demande, au motif qu’Aryian*, qui appartient à la catégorie des Kurdes dits ajnabi, aurait soit reçu la nationalité syrienne en 2012, soit n’aurait pas fourni les efforts nécessaires pour l’obtenir. Saisi par Aryian*, le Tribunal fédéral (TF) casse la décision du SEM. Dans son arrêt rendu en avril 2021, il réfute l’absence de «raisons valables» au départ d’Aryian* de la Syrie ainsi que l’affirmation selon laquelle le recourant n’aurait pas fourni les efforts nécessaires pour acquérir la nationalité syrienne. Il considère en outre qu’on ne peut exiger d’Aryian* qu’il attende de pouvoir retourner en Syrie pour obtenir la citoyenneté. Le TF admet donc le recours et ordonne au SEM de reconnaitre Aryian* comme apatride.
Cas individuel — 23/09/2024

Le TF ordonne la reconnaissance du statut d’apatride pour un Syrien ajnabi

Kurde originaire de Syrie et dépourvu de nationalité, Akar* dépose en février 2021 une demande de reconnaissance d’apatridie auprès du SEM. Ce dernier rejette sa demande au motif qu’Akar* n’aurait pas démontré appartenir à la catégorie des Kurdes dits Maktoum (Kurdes reconnu·es apatrides), mais appartiendrait très certainement à la catégorie des Kurdes dits ajnabi – un statut qui lui permettrait, en retournant en Syrie, de réclamer la nationalité syrienne. Saisi par recours, le TAF confirme l’appréciation du SEM. Akar* dépose alors un recours au TF, qui lui donne raison: le TF considère que même si Akar* est Ajnabi, aucune des instances inférieures n’a contesté qu’il était dépourvu de nationalité. Or, en lui octroyant une admission provisoire, elles ont également reconnu que ce retour en Syrie était inexigible, rendant de facto l’accès à une nationalité syrienne impossible. Partant, le TF admet le recours et ordonne la reconnaissance de l’apatridie d’Akar*.
Cas individuel — 01/01/2024

Harcelée en Croatie, une famille est menacée d’y être renvoyée

En 2019, Romina* et Khaleel* quittent l’Afghanistan avec leur fille (Emna*), encore mineure et leurs trois fils majeurs. Ils demandent l’asile en Suisse en octobre 2020, après être passé∙es par la Croatie. La famille raconte avoir tenté de passer la frontière entre la Bosnie et la Croatie à plus de 15 reprises, avoir été arrêté∙es par les autorités croates puis maltraité·es, volé·es, déshabillé·es et frappé·es. En février 2020, le SEM rend une décision NEM Dublin. Le mandataire d’Ehsan* et Noura* dépose un recours au TAF contre la décision du SEM. En avril 2021, le SEM annule sa décision de NEM Dublin pour le second fils et sa famille, qui reçoivent une admission provisoire. En juillet 2021, le TAF prononce les arrêts qui rejettent respectivement les recours de Moussa*, de Ehsan* et Noura* et de Romina* et Khaleel*.