Rapport d’observation 2017-2019: une radiographie du contrôle migratoire suisse
La volonté d’une politique migratoire stricte, la suspicion et la crainte de supposés «abus» l’emportent encore trop souvent sur le devoir de protection des personnes et sur le respect de leurs droits fondamentaux.
C’est le bilan que tire l’ODAE romand de ses observations de terrain sur les deux dernières années, synthétisées dans son 9e rapport d’observation. Celui-ci a été rendu public le 28 octobre 2019.
Dans le domaine du droit de la libre circulation (ALCP), quand il s’agit de la prolongation d’un statut ou de regroupement familial, certaines autorités portent atteinte à l’Etat de droit en appliquant des critères non prévus par cette loi, en fondant leur décision sur une jurisprudence inadéquate, et en ignorant les droits spécifiques conférés par l’ALCP.
Dans le domaine du droit des étrangers, les personnes font aussi face à des exigences inconsidérées ou illégales et à des décisions erronées, ainsi qu’à de nombreuses incertitudes et tracasseries administratives. Quant aux femmes migrantes victimes de violences conjugales, elles sont confrontées à d’importantes difficultés pour voir leur permis renouvelé lorsqu’elles se séparent de leur mari violent.
Dans le domaine du droit d’asile, le règlement Dublin, appliqué de manière quasi automatique, donne toujours lieu à des situations dramatiques. Lorsqu’il s’agit d’examiner les demandes sur le fond, les critères d’octroi de l’asile restent restrictifs, ou se durcissent comme pour les Erythréen·ne·s. Les personnes en quête d’asile font face à de nombreux obstacles administratifs et il est très difficile pour elles de prouver la vraisemblance des persécutions subies ou qu’elles risquent dans leurs pays d’origine. Pour les personnes ayant reçu une réponse négative, les conditions de vie en Suisse, les mesures de détention et les pratiques de renvois restent préoccupantes. Enfin, la situation des personnes admises à titre provisoire et celle des mineur·e·s non accompagné·e·s et des jeunes adultes sont extrêmement précaires.
Les situations concrètes décrites au fil des pages de ce rapport rappellent qu’au-delà de l’abstraction des textes de loi, leur application au jour le jour concerne les vies de nombreuses personnes. Elles posent la question de la proportionnalité de certaines décisions au regard des droits fondamentaux.
Elles montrent aussi que le travail de défense effectué par les mandataires est essentiel. Pourtant, combien de personnes ne bénéficient pas d’une défense de qualité ou renoncent à faire reconnaître leurs droits face à une procédure éprouvante ? Trop souvent encore les voix des personnes sont réduites au silence, les parcours sont oubliés et les droits sont niés.