Sortie du rapport alternatif sur la torture en Suisse

Suisse, 12.06.2023 – En juillet, le CAT s’apprête à analyser le 8ème rapport périodique de la Suisse. En prévision de cette étude, la Plateforme des ONG suisses pour les droits humains, regroupant plus de 100 organisations dans toute la Suisse, a publié un rapport alternatif au sujet de ses propres observations sur le respect par la Suisse de ses obligations en termes de droits humains. Son rapport lui permet surtout de proposer aux autorités plusieurs recommandations pour améliorer la situation dans le pays.

Dans sa prise de position, la Plateforme scrute le domaine de l’asile sous plusieurs angles et relève les principales lacunes, notamment observées au niveau de la détention, des renvois et des violences policières. La Plateforme souligne une capacité maximale des prisons souvent dépassée et, au sujet de la détention administrative, recommande que la Suisse contrôle si les cantons respectent leur obligations (pas de détention administrative des mineurs et renforcer le contrôle indépendant et la surveillance proactive des Centres fédéraux d’asile).

Un autre aspect problématique concerne le non-refoulement: la Suisse ne devrait pas se contenter d’exécuter des renvois, mais étudier les risques pour le ou la demandeur·euse d’asile une fois déportée. La Plateforme recommande également de cesser urgemment les rapatriements forcés. Enfin, l’usage excessif de la force publique est abordé. La Plateforme encourage à veiller à l’enregistrement systématique des plaintes et demande aux cantons de prendre les mesures appropriées pour éradiquer les comportements racistes de la part des membres de la force publique.

Source: humanrights.ch, «Torture et mauvais traitements: lacunes importantes dans les domaines de la détention, l’asile et les violences policières», 12.06.2023 ; La Plateforme des ONG suisses pour les droits humains, «Rapport alternatif», 12.06.2023 ; asile.ch, «la Plateforme | Asile, détention: rapport alternatif sur les traitements cruels, inhumains, dégradants», 03.07.2023.

Cas relatifs

Cas individuel — 04/11/2025

Il n’est pas soigné pour son hépatite B malgré le risque de cirrhose, parce que son renvoi entrainera une interruption du traitement

John* est atteinte d'une hépatite B avec risque de développement en Cirrhose. Un traitement médical est nécessaire. Cependant, John* étant détenu dans l'attente de son renvoi, le traitement n'est pas instauré en raison des risques que causerait son interruption.
Cas individuel — 14/04/2025

«Mes enfants sont terrorisés. Je ne sais plus quoi faire ni comment arrêter ce calvaire.»

Léonie*, ressortissante Burundaise, est victime de persécutions dans son pays. En juin 2022, elle demande l’asile en Suisse avec ses trois enfants. Leur demande est rejetée en 2023 par le SEM puis par le TAF. La famille subit alors un véritable harcèlement policier: alors que Léonie* est hospitalisée en psychiatrie, son fils est arrêté à leur domicile pour être détenu à l’aéroport puis relâché. Sa fille aînée est également arrêtée à deux reprises, emmenée à l’aéroport puis relâchée. Enfin, la fille cadette se retrouve hospitalisée en psychiatrie, dans un état de choc, après que des agents ont essayé de l’arrêter au cabinet de sa psychologue. Malgré ces arrestations à répétition, Léonie* et ses enfants demandent le réexamen de leur décision d’asile, en raison d’éléments nouveaux survenus au Burundi et de l’état de santé de Léonie* qui se dégrade. Le SEM suspend l’exécution du renvoi de cette dernière, mais refuse de réexaminer la demande des enfants, désormais tous trois majeurs.
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Pour avoir déposé plainte pour vol, elle perd son logement, son travail et risque le renvoi

Kelia*, originaire de Colombie, vit à Genève depuis février 2017. Elle travaille en tant qu’employée dans l’économie domestique mais ne possède pas de titre de séjour. En mai 2023, elle est victime d’un vol à la tire. Un policier, témoin du vol, arrête le voleur et demande à Kelia* de le suivre au poste pour déposer plainte. La police se rend alors compte de sa situation juridique. Son employeuse est convoquée et amendée, malgré le fait qu’elle avait déclaré l’engagement de Kelia* auprès du Service de la population et cotisé pour ses assurances sociales. Elle est contrainte mettre fin au contrat de travail de Keila*. La personne qui lui loue son appartement lui demande de quitter les lieux. Keila* écope en outre d’une peine de 30 jours amende en plus du paiement des frais de procédure, pour infraction à l’art. 30 LEI (séjour illégal). Enfin, l’Office cantonal de la population lui adresse une décision d’expulsion avec un départ fixé à la fin novembre 2024.
Cas individuel — 15/10/2024

Le TF ordonne la reconnaissance du statut d’apatride pour un ressortissant kurde

Kurde de Syrie vivant en Suisse au bénéfice d’une admission provisoire (permis F), Aryian* dépose une demande de reconnaissance d’apatridie en 2015. Le SEM puis le TAF refusent sa demande, au motif qu’Aryian*, qui appartient à la catégorie des Kurdes dits ajnabi, aurait soit reçu la nationalité syrienne en 2012, soit n’aurait pas fourni les efforts nécessaires pour l’obtenir. Saisi par Aryian*, le Tribunal fédéral (TF) casse la décision du SEM. Dans son arrêt rendu en avril 2021, il réfute l’absence de «raisons valables» au départ d’Aryian* de la Syrie ainsi que l’affirmation selon laquelle le recourant n’aurait pas fourni les efforts nécessaires pour acquérir la nationalité syrienne. Il considère en outre qu’on ne peut exiger d’Aryian* qu’il attende de pouvoir retourner en Syrie pour obtenir la citoyenneté. Le TF admet donc le recours et ordonne au SEM de reconnaitre Aryian* comme apatride.