Migrantes victimes de violences conjugales :
vers une meilleure prise en compte des avis des spécialistes

Selon l’art. 50 LEtr, une personne mise au bénéfice d’un permis B suite à son mariage avec un Suisse ou un titulaire d’un permis C a le droit de rester en Suisse après une séparation – même si l’union a duré peu de temps – lorsque des raisons personnelles majeures l’imposent. Parmi ces raisons, figure le fait d’avoir subi des violences conjugales. Depuis janvier 2012, les avis de spécialistes consultés par la victime doivent être dûment pris en considération au moment de constater les violences (art. 77 al. 6bis OASA). Or, bien souvent, l’Office fédéral des migrations donne plus de poids à l’absence de condamnation pénale de l’époux ou aux dires de celui-ci qu’aux certificats des services spécialisés faisant le constat de la gravité des violences subies (voir le cas « Carolina »).

Dans un arrêt du 30 juillet 2014, le Tribunal administratif fédéral reproche à l’Office de n’avoir pas pris en compte de manière adéquate les constats médicaux et les certificats d’une maison pour femmes et d’un centre de conseil ayant suivi une ressortissante marocaine victime de violences. L’Office s’était appuyé de manière prépondérante sur l’absence de condamnation de l’époux et sur le fait que celui-ci avait déposé plainte pour diffamation contre sa femme car elle l’avait dénoncé pour violences. Pour le Tribunal, les certificats de spécialistes – tout comme les « déclarations constantes » de la victime – rendent crédible le climat de violence qui régnait dans le couple, indépendamment de la procédure pour diffamation ou du non-lieu auquel a abouti la plainte pénale pour violences. Suite à cette décision, la jeune femme a pu obtenir le renouvellement de son permis de séjour.

Source : arrêt du TAF C-6450/2012 du 30 juillet 2014.

Voir également le rapport Femmes étrangères victimes de violences conjugales, 2e édition révisée, 2012.

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