Le Conseil des États rejette l’interdiction de la détention administrative des mineur·e·s

Berne, 10 mars 2021 – Par 17 voix contre 16, le Conseil des États a rejeté une initiative cantonale genevoise qui souhaitait proscrire la détention de personnes mineures en vue d’un renvoi. À l’heure actuelle, seul·e·s celles et ceux âgé·e·s de plus de 15 ans peuvent être concerné·e·s.

Alors que le Conseil national avait approuvé l’initiative en septembre dernier, les opposant·e·s à cette interdiction ont jugé que l’application de la détention était une compétence cantonale et qu’une modification de la LEI ne se justifiait pas. Pour les partisan·ne·s de l’interdiction, la détention administrative de personnes mineures, qui n’ont commis aucun délit, est toujours disproportionnée et contrevient au bien-être des enfants.

Cela fait de nombreuses années que la pratique est jugée inadmissible en regard du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant et que les fortes disparités cantonales en la matière sont décriées par diverses organisations et instituions. Dans un rapport de mai 2019, la Commission nationale de prévention de la torture (CNPT) révélait qu’en 2017-2018, 37 mineur·e·s avaient été placé·e·s en détention administrative pour des durées de 2 à 120 jours. Elle montrait aussi que trois cantons avaient détenu des personnes de moins de 15 ans avec leur famille, une pratique pourtant prohibée (art. 80 al. 4 LEI). Fin 2018, la Commission de gestion externe du Parlement avait vivement condamné ces pratiques illégales.

Sources : Parlement suisse, « Pas d’interdiction de la détention administrative des mineurs », dépêche ATS, 10.03.2021 ; CNPT, Rapport au Département fédéral de justice et police (DFJP) et à la Conférence des directrices et directeurs des départements cantonaux de justice et police (CCDJP) relatif au contrôle des renvois en application du droit des étrangers d’avril 2018 à mars, Rapport, 24.05.2019 ; Marie Vuilleumier, « Critiquée, la Suisse continue d’emprisonner des enfants », Swissinfo, 06.11.2019.

Cas relatifs

Cas individuel — 15/07/2025

La Suisse reproche à deux enfants seuls de ne pas avoir franchi une frontière pour déposer leur demande de regroupement familial dans les délais

Esther* arrive en Suisse en 2012, à l’âge de 17 ans et demi, et obtient une admission provisoire (permis F). En partant, elle a été contrainte de laisser ses deux fils en Somalie. Elle obtient un permis B par mariage en 2015. Un délai de cinq ans s’ouvre alors pour demander un regroupement familial en faveur de ses fils, mais ceux-ci n’ont pas le droit de se rendre seuls au Kenya, où se trouve la seule ambassade suisse habilitée à enregistrer la demande. Ce n’est qu’en 2024, lorsque leur tutrice décide de déménager au Kenya et de les emmener avec elle, qu’ils peuvent alors déposer officiellement la demande. Les autorités cantonales rendent un préavis négatif au motif que la demande est tardive. Esther* fait alors valoir l’existence de raisons personnelles majeures – ses enfants allant bientôt être livrés à eux-mêmes - justifiant un regroupement familial tardif. La demande est toujours en cours.
Cas individuel — 14/04/2025

«Mes enfants sont terrorisés. Je ne sais plus quoi faire ni comment arrêter ce calvaire.»

Léonie*, ressortissante Burundaise, est victime de persécutions dans son pays. En juin 2022, elle demande l’asile en Suisse avec ses trois enfants. Leur demande est rejetée en 2023 par le SEM puis par le TAF. La famille subit alors un véritable harcèlement policier: alors que Léonie* est hospitalisée en psychiatrie, son fils est arrêté à leur domicile pour être détenu à l’aéroport puis relâché. Sa fille aînée est également arrêtée à deux reprises, emmenée à l’aéroport puis relâchée. Enfin, la fille cadette se retrouve hospitalisée en psychiatrie, dans un état de choc, après que des agents ont essayé de l’arrêter au cabinet de sa psychologue. Malgré ces arrestations à répétition, Léonie* et ses enfants demandent le réexamen de leur décision d’asile, en raison d’éléments nouveaux survenus au Burundi et de l’état de santé de Léonie* qui se dégrade. Le SEM suspend l’exécution du renvoi de cette dernière, mais refuse de réexaminer la demande des enfants, désormais tous trois majeurs.
Cas individuel — 24/08/2009

Procédure à l'aéroport: 47 jours de rétention pour une fillette

Après avoir demandé l’asile à l’aéroport, une fillette et sa mère sont retenues durant 47 jours dans la zone de transit. Elles y séjournent dans des conditions inappropriées, surtout pour une enfant. Même le droit à une promenade quotidienne n’est pas respecté.
Cas individuel — 24/08/2009

Renvoyé de force au moment où il allait se marier

Abdoulaye, dont la demande d’asile a été rejetée, vit avec sa compagne suisse avec laquelle il a eu un enfant. Alors que des démarches de reconnaissance de l’enfant et de mariage sont en cours, Abdoulaye est arrêté, mis en détention, et renvoyé par vol spécial en Guinée.