L’apprentissage est désormais accessible pour les jeunes sans-papiers

Depuis le 1er février 2013, les jeunes sans-papiers peuvent, sous certaines conditions, effectuer un apprentissage en Suisse et requérir, au nom de celui-ci, une autorisation de séjour valable jusqu’à la fin de leur formation. L’Ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative (OASA) a été modifiée dans le sens de la motion du conseiller national Luc Barthassat, déposée en 2008 et adoptée par l’Assemblée fédérale en 2010, contre l’avis du Conseil fédéral. Depuis les années 1990, les enfants en situation irrégulière ont progressivement pu avoir accès à la scolarité obligatoire, mais se retrouvaient parfois bloqués par la suite car seule la filière gymnasiale leur était ouverte.

En vertu de l’art. 30a OASA récemment adopté par le Conseil fédéral, les employeurs peuvent désormais engager des apprentis en séjour irrégulier. Ces jeunes peuvent obtenir une autorisation de séjour valable jusqu’à la fin de leur formation, pour autant qu’ils aient été scolarisés en Suisse de manière ininterrompue pendant au moins cinq ans, qu’ils aient trouvé une place d’apprentissage dans les douze mois suivant la fin de leur scolarité, qu’ils maitrisent une langue nationale et qu’ils n’aient pas commis de délits. Ils doivent par ailleurs faire preuve d’une bonne intégration et justifier de leur identité. La demande doit être adressée aux autorités cantonales par l’employeur. En cas de décision négative, un recours peut être interjeté au niveau cantonal. Si le canton donne un préavis favorable, la demande est ensuite examinée par l’ODM qui, s’il accède à la requête, édicte une autorisation de séjour dite pour cas de rigueur (permis B). Les parents et les frères et sœurs du jeune concerné peuvent également obtenir une telle autorisation, après l’examen de leur situation selon les critères de l’art. 31 OASA. Après son apprentissage, la prolongation de l’autorisation de séjour du jeune est également possible sur les mêmes bases.

Dans un communiqué de presse daté du 25 janvier 2013, la Commission fédérale pour les questions de migration a invité les autorités cantonales à se prononcer rapidement sur de telles demandes, vu le risque de perdre la place d’apprentissage si la procédure est trop longue. Elle fait également part de sa crainte de voir les demandes traitées différemment suivant les cantons, onze d’entre eux ayant rejeté la modification lors de la procédure de consultation.

Sources :

 communiqué de presse de la Commission fédérale pour les questions de migration, 25.01.2013

 Guide : apprentissage professionnel pour les sans-papiers, Commission fédérale pour les questions de migration

 Modification de l’Ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative, Conseil fédéral, 7.12.2012

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Refus de regroupement familial pour une famille avec double nationalité

Larissa*, originaire du Brésil, arrive en Suisse en 2022 pour vivre auprès de ses quatre enfants. Elle rejoint notamment sa fille Camila*, titulaire d’un permis C et mariée à Nicolas*, binational franco-suisse. En 2023, Larissa* demande l’octroi d’une autorisation de séjour par regroupement familial. En février 2024, le Service cantonal de la population refuse sa demande, au motif que l’ALCP ne s’appliquerait pas à leur situation. Appuyée par un mandataire, Larissa* interjette un recours contre cette décision auprès du Tribunal cantonal (TC), en soulignant la discrimination à rebours dont elle est victime. Mais celui-ci rejette son recours, en invoquant un arrêt du Tribunal fédéral qui affirme que si le lien familial qui fonde la demande de regroupement – en l’occurrence le mariage de Nicolas avec la fille de Larissa* – a été créé après l’arrivée du couple en Suisse , l’ALCP ne s’appliquerait pas.
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