L’accès à l’apprentissage pour les jeunes sans-papiers durement mis à l’épreuve

Depuis le 1er février 2013, les jeunes sans statut légal peuvent réaliser un apprentissage sous certaines conditions et obtenir ainsi une autorisation de séjour (voir notre brève). Ce changement législatif intervient suite à la motion du conseiller national Luc Barthassat et est inscrit dans l’art. 30a de l’Ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative (OASA).

Malgré ces nouvelles dispositions, la Plateforme nationale pour les sans-papiers constate que l’accès à l’apprentissage demeure entravé. Les chiffres parlent d’eux-mêmes du fait que seules deux jeunes, sur une estimation de 200 à 400 candidats potentiels par année, ont déposé une demande auprès de l’Office fédéral des migrations (ODM). Plusieurs obstacles sont pointés du doigt pour expliquer ce phénomène et ce collectif invite à modifier ledit article comme suit : anonymiser les demandes ; restreindre les preuves d’intégration au seul fait d’avoir trouvé une place d’apprentissage ; octroyer un permis de séjour automatique aux membres de la famille ; remettre une attestation pendant le traitement d’une demande et que cette dernière ne dépasse pas la durée d’un mois.

La Commission Fédérale pour les questions de Migration (CFM) arrive au même constat en considérant les contraintes comme trop conséquentes. Ses membres appellent ainsi à une nécessaire nouvelle réglementation. Dans l’urgence de la rentrée scolaire, ils encourageaient, en juin dernier, les autorités cantonales à examiner les demandes d’accès aux apprentissages des jeunes sans-papiers avec bienveillance.

Alors que ces différents acteurs exposent ces positions, une motion de la conseillère nationale Céline Amaudruz a été acceptée en date du 12 juin 2014. Elle vise à traiter cette problématique sous la forme d’une loi fédérale – devant ainsi être débattue au parlement et pouvant être soumise à référendum – et non d’une modification d’ordonnance. Cette motion que le Conseil fédéral propose de rejeter est, à présent, au Conseil des États.

Sources :

 Communiqué de presse de la Plateforme nationale pour les sans-papiers, 26.08.2014.

 CFM, 03.06.2014.

 Motion 12.3515, « Apprentissage professionnel pour les sans-papiers. Empêcher la fraude orchestrée par ordonnance ».

 Bulletin officiel du Conseil national, Session d’été 2014, 12.06.2014.

Cas relatifs

Cas individuel — 25/06/2025

Refus de regroupement familial pour une famille avec double nationalité

Larissa*, originaire du Brésil, arrive en Suisse en 2022 pour vivre auprès de ses quatre enfants. Elle rejoint notamment sa fille Camila*, titulaire d’un permis C et mariée à Nicolas*, binational franco-suisse. En 2023, Larissa* demande l’octroi d’une autorisation de séjour par regroupement familial. En février 2024, le Service cantonal de la population refuse sa demande, au motif que l’ALCP ne s’appliquerait pas à leur situation. Appuyée par un mandataire, Larissa* interjette un recours contre cette décision auprès du Tribunal cantonal (TC), en soulignant la discrimination à rebours dont elle est victime. Mais celui-ci rejette son recours, en invoquant un arrêt du Tribunal fédéral qui affirme que si le lien familial qui fonde la demande de regroupement – en l’occurrence le mariage de Nicolas avec la fille de Larissa* – a été créé après l’arrivée du couple en Suisse , l’ALCP ne s’appliquerait pas.
Cas individuel — 01/01/2024

Harcelée en Croatie, une famille est menacée d’y être renvoyée

En 2019, Romina* et Khaleel* quittent l’Afghanistan avec leur fille (Emna*), encore mineure et leurs trois fils majeurs. Ils demandent l’asile en Suisse en octobre 2020, après être passé∙es par la Croatie. La famille raconte avoir tenté de passer la frontière entre la Bosnie et la Croatie à plus de 15 reprises, avoir été arrêté∙es par les autorités croates puis maltraité·es, volé·es, déshabillé·es et frappé·es. En février 2020, le SEM rend une décision NEM Dublin. Le mandataire d’Ehsan* et Noura* dépose un recours au TAF contre la décision du SEM. En avril 2021, le SEM annule sa décision de NEM Dublin pour le second fils et sa famille, qui reçoivent une admission provisoire. En juillet 2021, le TAF prononce les arrêts qui rejettent respectivement les recours de Moussa*, de Ehsan* et Noura* et de Romina* et Khaleel*.
Cas individuel — 11/12/2023

Il passe 23 ans en Suisse avant d’obtenir une admission provisoire

Abdelkader* aura passé plus de 23 ans en Suisse avant d’obtenir un permis de séjour. Il lui aura fallu déposer une nouvelle demande de réexamen à l’âge de 62 ans.
Cas individuel — 22/12/2022

Débouté à deux reprises malgré des agressions homophobes attestées en Ukraine

Témoignage – Emir* quitte l’Ukraine en 2020 suite à des persécutions liées à son orientation sexuelle. En Suisse, sa demande d’asile est refusée par le SEM et son recours rejeté par le TAF. Il repart en Ukraine, où il subit de nouvelles violences. Revenu en Suisse, sa demande d’asile essuie le même refus des autorités.