Facilitée, la naturalisation présente pourtant toujours des obstacles

Suisse, 21.03.21 – En 2017, le peuple suisse approuvait à plus de 60% de la naturalisation facilitée pour les étranger·ères de troisième génération. Cette mesure devait permettre à quelque 25’000 personnes d’obtenir plus facilement le passeport helvétique, un chiffre établi par une étude datant de 2016. Après une première année, un rapport signalait déjà de nombreux obstacles, tels que parvenir à prouver le séjour des grands-parents en Suisse ou encore justifier 5 ans de scolarité au moins en Suisse pour les parents.

Trois ans après l’entrée en vigueur de la mesure, le quotidien 24 Heures, reprenant une enquête de la «NZZ am Sonntag», rapporte que seules 1’868 personnes ont obtenu le passeport par ce biais. La raison de ce faible intérêt concerne les mêmes obstacles à la démarche administrative. Si la procédure est effectivement simplifiée – moins chère et plus rapide, car elle est directement effectuée auprès de la Confédération et ne comprend plus le test de naturalisation – trouver des preuves du séjour des grands-parents et de la scolarité d’un·e parent s’avère toujours compliqué. Souvent, les archives communales ne permettent pas de documenter un séjour remontant à plusieurs dizaines d’années. Par ailleurs, si la famille a déménagé au fil des années, retrouver la commune administrative de résidence des grands-parents n’est pas évident. Enfin, le critère de 5 ans de scolarité de l’un·e des deux parents est également ardu : il arrive fréquemment que ces dernier·ères soient arrivés adolescent·es en Suisse et aient ensuite suivi un apprentissage, des années qui ne sont pas comptabilisées. De nombreux obstacles, qui expliquent que bon nombre de candidat·es à la naturalisation renoncent à ce droit, ou optent pour la procédure ordinaire plutôt que sa formule simplifiée.

Sources : Lucie Monnat, «La naturalisation facilitée n’est pas si simple», 24 Heures, 21.03.2021 ; Commission fédérale des migrations, «Naturalisation facilitée pour les jeunes de la 3e génération : La CFM tire le bilan», 12.03.2019 ; Philippe Wanner, «Étude sur les jeunes étranger-e-s de la troisième génération vivant en Suisse. Estimation statistique de la taille de cette population», Secrétariat d’État aux migrations, 2016.

Cas relatifs

Cas individuel — 06/03/2025

Pour avoir déposé plainte pour vol, elle perd son logement, son travail et risque le renvoi

Kelia*, originaire de Colombie, vit à Genève depuis février 2017. Elle travaille en tant qu’employée dans l’économie domestique mais ne possède pas de titre de séjour. En mai 2023, elle est victime d’un vol à la tire. Un policier, témoin du vol, arrête le voleur et demande à Kelia* de le suivre au poste pour déposer plainte. La police se rend alors compte de sa situation juridique. Son employeuse est convoquée et amendée, malgré le fait qu’elle avait déclaré l’engagement de Kelia* auprès du Service de la population et cotisé pour ses assurances sociales. Elle est contrainte mettre fin au contrat de travail de Keila*. La personne qui lui loue son appartement lui demande de quitter les lieux. Keila* écope en outre d’une peine de 30 jours amende en plus du paiement des frais de procédure, pour infraction à l’art. 30 LEI (séjour illégal). Enfin, l’Office cantonal de la population lui adresse une décision d’expulsion avec un départ fixé à la fin novembre 2024.
Cas individuel — 26/01/2015

Après sept ans d’attente d’un permis, le renvoi d’une Portugaise est prononcé

« Ana » travaille en Suisse de 2004 à 2007 au bénéfice d’un permis L en tant que ressortissante de l’Union Européenne. Par la suite, sa demande de renouvellement de permis n’est pas traitée bien qu’elle en remplisse manifestement les critères. Ce n’est qu’en 2014, suite au dépôt d'un recours pour déni de justice, que l’OCPM rend une décision. Celle-ci est négative au motif qu’« Ana » ne travaille plus, alors que c’est l’Office qui a rendu sa situation précaire.
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Persécutés au Sri Lanka pour avoir collaboré avec les forces rebelles, « Sahani » et sa famille rejoignent la Suisse en 2008. Elle et sa famille attendront trois ans pour être entendus sur leurs motifs d’asile. Depuis lors, malgré les relances de la mandataire et les certificats médicaux faisant état de la fragilité de « Sahani », l’ODM n’a toujours pas statué sur leur demande.