Dépôts de plaintes contre l’Agence Frontex: un mécanisme juridique à mettre en place

Suisse, février 2023 – Depuis le 1er septembre 2022, les personnes en procédure d’asile en Suisse ont droit à un soutien juridique pour déposer plainte contre le personnel de l’Agence Frontex ou des polices nationales dont les agissements ou l’inaction auraient porté atteinte à leurs droits fondamentaux. Alors que différents rapports (de l’OSAR et de l’Office européen de lutte antifraude entre autres) ont démontré les violations des droits humains aux frontières européennes, ce mécanisme juridique représente une avancée, permise par la mise en œuvre au niveau suisse du règlement de l’Union européenne 2019/1896. Elle soulève toutefois un certain nombre de questions.

Des expert·es pointent des faiblesses structurelles juridiques, dont l’absence d’organe indépendant, de voie de droit et de caractère contraignant. Par ailleurs, la Suisse doit mettre à disposition le temps et les ressources nécessaires pour ce soutien juridique. Cela comprend le fait d’informer les personnes de l’existence de ce mécanisme, aujourd’hui encore méconnu. L’établissement de faits constitutifs de violations des droits fondamentaux et le suivi des dossiers doivent être inclus dans le cahier des charges des services assurant la représentation juridique, qui pour l’instant ont vocation à s’achever passée la transmission de la plainte. L’accompagnement juridique devient compliqué en particulier dans les cas de procédures de non-entrée en matière et de procédure accélérée, mais encore plus lors de décision négative assortie d’un renvoi vers le pays d’origine ou d’un transfert vers un Etat Dublin.

Source: Asyl, «Le rôle de la protection juridique dans le dépôt de plaintes contre l’Agence Frontex», 2023.

Voir également: OSAR, «Frontex : l’agence antifraude de l’UE confirme de graves accusations», 14.10.22 ; ODAE romand, «Refoulements aux frontières et atteintes aux droits humains», brève, 14.10.21.

Cas relatifs

Cas individuel — 06/03/2025

Pour avoir déposé plainte pour vol, elle perd son logement, son travail et risque le renvoi

Kelia*, originaire de Colombie, vit à Genève depuis février 2017. Elle travaille en tant qu’employée dans l’économie domestique mais ne possède pas de titre de séjour. En mai 2023, elle est victime d’un vol à la tire. Un policier, témoin du vol, arrête le voleur et demande à Kelia* de le suivre au poste pour déposer plainte. La police se rend alors compte de sa situation juridique. Son employeuse est convoquée et amendée, malgré le fait qu’elle avait déclaré l’engagement de Kelia* auprès du Service de la population et cotisé pour ses assurances sociales. Elle est contrainte mettre fin au contrat de travail de Keila*. La personne qui lui loue son appartement lui demande de quitter les lieux. Keila* écope en outre d’une peine de 30 jours amende en plus du paiement des frais de procédure, pour infraction à l’art. 30 LEI (séjour illégal). Enfin, l’Office cantonal de la population lui adresse une décision d’expulsion avec un départ fixé à la fin novembre 2024.
Cas individuel — 26/01/2015

Après sept ans d’attente d’un permis, le renvoi d’une Portugaise est prononcé

« Ana » travaille en Suisse de 2004 à 2007 au bénéfice d’un permis L en tant que ressortissante de l’Union Européenne. Par la suite, sa demande de renouvellement de permis n’est pas traitée bien qu’elle en remplisse manifestement les critères. Ce n’est qu’en 2014, suite au dépôt d'un recours pour déni de justice, que l’OCPM rend une décision. Celle-ci est négative au motif qu’« Ana » ne travaille plus, alors que c’est l’Office qui a rendu sa situation précaire.
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Une famille attend depuis 5 ans une décision sur sa demande d’asile

Persécutés au Sri Lanka pour avoir collaboré avec les forces rebelles, « Sahani » et sa famille rejoignent la Suisse en 2008. Elle et sa famille attendront trois ans pour être entendus sur leurs motifs d’asile. Depuis lors, malgré les relances de la mandataire et les certificats médicaux faisant état de la fragilité de « Sahani », l’ODM n’a toujours pas statué sur leur demande.