Arrêt de principe du TAF sur les renvois en Grèce
Après la Cour Européenne des droits de l’homme en janvier dernier (arrêt M.S.S. contre Belgique et Grèce), c’est au tour du Tribunal administratif fédéral (TAF) de se prononcer sur le renvoi de requérants d’asile en Grèce. Dans un arrêt de principe très attendu (arrêt D-2076/2010), le TAF estime que les autorités grecques ne respectent pas leurs engagements internationaux vis-à-vis des requérants d’asile, et que les renvois de requérants sur la Grèce doivent rester l’exception.
Le TAF statuait sur le cas d’un Afghan, veuf, arrivé en Suisse en 2009 avec ses deux enfants après avoir transité par la Grèce en 2008. L’ODM avait prononcé une non-entrée en matière à sa demande d’asile, prononçant son renvoi vers la Grèce, jugeant que la Grèce respectait le droit international et le principe de non-refoulement vers un autre Etat.
Dans l’arrêt, le TAF s’appuie sur plusieurs rapports pour démontrer la situation préoccupante des requérants d’asile en Grèce : mise en détention dans des centres sales et surpeuplés, insultes, violences physiques, procédure d’asile menée sans traducteurs, méconnaissance par les requérants de leurs droits (parfois suite à une mauvaise information).
Le TAF considère que le renvoi du requérant vers la Grèce est illicite. La cause est donc renvoyée à l’ODM pour qu’elle applique la clause de souveraineté et statue sur la demande d’asile du requérant.
Selon cet arrêt, les renvois vers la Grèce sont licites uniquement s’il est établi que le requérant échappera aux conditions déplorables de détention à son arrivée, aux risques de refoulement direct ou indirect ainsi qu’à une violation de son droit à faire recours (art. 13 CEDH). Le TAF précise toutefois que même si la personne bénéficie d’une autorisation de séjour au sens large en Grèce et que le renvoi s’avère licite, le transfert vers la Grèce pourrait être exclu pour des raisons humanitaires. Raisons humanitaires qui sont à évaluer pour chaque cas particulier. Une attention particulière sera portée sur les personnes vulnérables et âgées, les femmes seules, les mineurs et les familles avec enfants.
Sources: arrêt D-2076/2010 et Jusletter du 29 août 2011