Apprentissage pour les jeunes sans-papiers : accessible seulement à une minorité ?

Depuis le 1er février 2013, le nouvel article 30 de l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative (OASA) ouvre l’accès à l’apprentissage dual aux jeunes sans statut légal. Cette ordonnance vise à mettre fin à la discrimination subie par les jeunes sans-papiers à la fin de leur scolarité obligatoire. En effet, n’étant pas légalement autorisés à signer un contrat, la voie de l’apprentissage dual leur était jusqu’à présent interdite.

Une recherche sur l’accès à l’apprentissage, menée avant la mise en œuvre de ces nouvelles mesures, montre toutefois que l’ordonnance pourrait ne pas offrir de nouvelles ouvertures pour la majorité des personnes concernées. En effet, l’accès à l’apprentissage demeure soumis à un certain nombre de critères : les jeunes doivent notamment avoir suivi au moins cinq ans de scolarité obligatoire en Suisse, faire preuve d’un bon niveau d’intégration, et avoir déposé leur demande de régularisation dans les 12 mois suivant la scolarité obligatoire. Or seul un des cinq jeunes interrogées dans le cadre de la recherche correspondrait en réalité à ces critères.

De plus, les chercheuses relèvent qu’il est possible que cette ordonnance mette en échec certains jeunes ayant trouvé un employeur, mais qui ne correspondent pas aux critères définis par la Confédération. Leur demande de régularisation risque dès lors d’être rejetée d’emblée.

Sources

NILOUFER D., RUCHTI F., Les processus de recherche d’apprentissage des jeunes sans-papiers, Givisiez, HEF-TS, 2013.

Revue d’information sociale Reiso, Les jeunes sans-papiers face à l’apprentissage, 23 janvier 2014.

Cas relatifs

Cas individuel — 25/06/2025

Refus de regroupement familial pour une famille avec double nationalité

Larissa*, originaire du Brésil, arrive en Suisse en 2022 pour vivre auprès de ses quatre enfants. Elle rejoint notamment sa fille Camila*, titulaire d’un permis C et mariée à Nicolas*, binational franco-suisse. En 2023, Larissa* demande l’octroi d’une autorisation de séjour par regroupement familial. En février 2024, le Service cantonal de la population refuse sa demande, au motif que l’ALCP ne s’appliquerait pas à leur situation. Appuyée par un mandataire, Larissa* interjette un recours contre cette décision auprès du Tribunal cantonal (TC), en soulignant la discrimination à rebours dont elle est victime. Mais celui-ci rejette son recours, en invoquant un arrêt du Tribunal fédéral qui affirme que si le lien familial qui fonde la demande de regroupement – en l’occurrence le mariage de Nicolas avec la fille de Larissa* – a été créé après l’arrivée du couple en Suisse , l’ALCP ne s’appliquerait pas.
Cas individuel — 01/01/2024

Harcelée en Croatie, une famille est menacée d’y être renvoyée

En 2019, Romina* et Khaleel* quittent l’Afghanistan avec leur fille (Emna*), encore mineure et leurs trois fils majeurs. Ils demandent l’asile en Suisse en octobre 2020, après être passé∙es par la Croatie. La famille raconte avoir tenté de passer la frontière entre la Bosnie et la Croatie à plus de 15 reprises, avoir été arrêté∙es par les autorités croates puis maltraité·es, volé·es, déshabillé·es et frappé·es. En février 2020, le SEM rend une décision NEM Dublin. Le mandataire d’Ehsan* et Noura* dépose un recours au TAF contre la décision du SEM. En avril 2021, le SEM annule sa décision de NEM Dublin pour le second fils et sa famille, qui reçoivent une admission provisoire. En juillet 2021, le TAF prononce les arrêts qui rejettent respectivement les recours de Moussa*, de Ehsan* et Noura* et de Romina* et Khaleel*.
Cas individuel — 11/12/2023

Il passe 23 ans en Suisse avant d’obtenir une admission provisoire

Abdelkader* aura passé plus de 23 ans en Suisse avant d’obtenir un permis de séjour. Il lui aura fallu déposer une nouvelle demande de réexamen à l’âge de 62 ans.
Cas individuel — 22/12/2022

Débouté à deux reprises malgré des agressions homophobes attestées en Ukraine

Témoignage – Emir* quitte l’Ukraine en 2020 suite à des persécutions liées à son orientation sexuelle. En Suisse, sa demande d’asile est refusée par le SEM et son recours rejeté par le TAF. Il repart en Ukraine, où il subit de nouvelles violences. Revenu en Suisse, sa demande d’asile essuie le même refus des autorités.