Des emplois temporaires et aux revenus trop bas conduisent à une décision de renvoi
Luana*, originaire du Portugal, arrive en Suisse en avril 2018. Elle obtient une autorisation de séjour de courte durée (permis L) et cumule les emplois temporaires à faibles taux d’activité. En 2020, elle dépose une demande d’autorisation de séjour (permis B). Le Service de la population du canton de Vaud (SPOP) la refuse. Luana* dépose un recours auprès du Tribunal cantonal (TC), argumentant qu’elle a acquis la qualité de travailleuse Elle précise que son fils, également en Suisse au bénéfice d’une autorisation de séjour de courte durée, est prêt à la prendre en charge financièrement. En juin 2024, Le TC rend son arrêt. Il conclut que les activités de Luana* présentent un nombre d’heures trop faible avec des revenus trop bas pour être qualifiées de réelles et effectives, et lui dénie dont la qualité de travailleuse. Il ajoute que les revenus de son fils n’étant pas stables, sa prise en charge n’est pas assurée. Partant, le TC rejette le recours de Luana* et confirme la décision de son renvoi.
Personne concernée (*Prénom fictif): Luana*
Origine: Portugal
Statut: –
Chronologie
2018 : arrivée en Suisse, permis L (avril)
2020 : demande d’autorisation de séjour (mai)
2022 : refus du SPOP, opposition (août)
2023 : refus du SPOP contre l’opposition (juil.), recours auprès du Tribunal cantonal (août)
2024 : refus du recours par le Tribunal cantonal (juin)
Questions soulevées
Vu que pour avoir la qualité de travailleur·euse et partant un permis de séjour, l’emploi ne doit pas être considéré comme marginal ou accessoire, les personnes avec des contrats de travail précaires ne seront-elles pas toujours défavorisées?
Description du cas
Luana*, originaire du Portugal, est née en 1973. En avril 2018, elle arrive en Suisse et obtient une autorisation de séjour de courte durée (permis L). En mai 2020, alors que ses revenus se fondent sur plusieurs emplois temporaires à faibles taux d’activité, elle dépose une demande d’autorisation de séjour (permis B).
En novembre 2020, le Service de la population du canton de Vaud (SPOP) l’informe de son intention de refuser sa demande, au motif qu’elle n’aurait pas acquis la qualité de travailleuse ni ne remplirait les conditions pour une autorisation de séjour sans activité lucrative. En février 2021, Luana* informe le SPOP qu’elle est en arrêt maladie depuis avril 2020 et reçoit un appui financier de sa famille. En août 2021, elle bénéficie d’un droit au chômage et, dès janvier 2022, perçoit le revenu d’insertion (RI) en complément à ses revenus. En août 2022, le SPOP refuse l’autorisation de séjour de Luana* et prononce son renvoi de Suisse.
Luana* fait opposition à cette décision, argumentant qu’elle a acquis la qualité de travailleuse. Son fils, également titulaire d’une autorisation de séjour de courte durée, s’engage formellement à la prendre financièrement en charge. Néanmoins, en juillet 2023, le SPOP confirme sa décision de renvoi.
Appuyée par une mandataire, Luana* dépose un recours auprès du Tribunal cantonal (TC). Le SPOP confirme sa position, arguant que l’attestation de prise en charge du fils de Luana* n’est pas suffisante dans la mesure où il est sans activité lucrative et qu’en juillet 2023 il touchait le chômage. Luana* rétorque en septembre 2023, plaidant que son fils a trouvé un emploi à 100% depuis fin août et qu’elle a l’intention d’emménager avec lui afin de fermer son dossier RI. Le SPOP lui octroie trois mois de délai afin d’établir que son fils a une situation financière stable et peut la prendre en charge.
De décembre 2023 à mars 2024, Luana* travaille à 60% dans un EMS et, parallèlement, effectue un stage non rémunéré dans une Fondation. En janvier 2024, Luana* indique que son fils, ouvrier du bâtiment, se trouve actuellement au chômage à cause de la période hivernale mais que leur intention de cohabiter est maintenue. Elle informe que son propre stage est prolongé jusqu’en avril 2024 et pourrait déboucher sur un emploi. Néanmoins, le SPOP maintient sa décision.
Le TC commence par évaluer si l’activité menée par Luana* en Suisse peut être considérée comme réelle et effective ou si elle est au contraire marginale et accessoire, en tenant compte de l’éventuel caractère irrégulier des prestations accomplies, de leur durée limitée, ou de la faible rémunération qu’elles procurent. Il relève que Luana* a occupé plusieurs postes durant les années qu’elle a passées en Suisse, entrecoupés de périodes sans activité pour raisons médicales ou chômage. Depuis 2021, elle enchaîne les missions de brève durée, ne dépassant que rarement une dizaine ou quinzaine d’heures hebdomadaires, ce qui au vu de la jurisprudence, s’apparente à une activité marginale et accessoire. Le Tribunal reproche aussi à Luana* sa période de près d’un an de chômage, et des revenus mensuels inférieurs à 1’300 fr. Bien que son dernier emploi dure depuis près d’un an, il ne représenterait que 10 heures hebdomadaires et un revenu de 950 fr. Enfin, le TC reproche à Luana* de percevoir un complément RI.
En juin 2024, Le TC rend son jugement et conclut à un nombre d’heures trop faible avec un revenu moyen trop bas pour être qualifiés d’activité réelle et effective, et dénie dont la qualité de travailleuse de Luana*. Le Tribunal estime également que les revenus de son fils n’étant pas stables, celui-ci ne pourra pas la prendre en charge. Le TC rejette donc le recours de Luana* et confirme la décision de renvoi du SPOP.
Signalé par: CSP Vaud, la Frat
Source: Arrêt TC PE.2023.0112