La Suisse épinglée par le TAF pour des renvois «discrets» par jets

Suisse, 20.04.2023 – Une investigation du Courrier a révélé qu’entre 2012 et 2014 (au minimum), la Suisse a employé une petite compagnie française afin de renvoyer discrètement, à bord de ses jets, des personnes migrantes vers l’Italie. La Suisse a ainsi volontairement caché ses expulsions, puisque les vols étaient enregistrés comme des vols habituels de ligne. Entre 2014 et 2016, le pays a tout fait pour garder ces méthodes secrètes et ne pas dévoiler les contrats.

Le stratagème a ainsi permis au pays de contourner les règles établies par l’Italie, qui interdisait les vols spéciaux, en effectuant des renvois sous le radar de cette dernière. La Suisse a également échappé au contrôle de la Commission nationale de prévention de la torture (CNPT), qui est toujours présente dans les vols spéciaux. Si le Tribunal administratif fédéral a finalement contraint le SEM à révéler certains de ces contrats, de telles pratiques se poursuivent encore. En 2022, deux Algériens ont été renvoyés par ce type d’avion. Dans son article, le Courrier rappelle que le SEM est tenu d’être transparent sur ses renvois, pour le respect des droits humains et de la dignité humaine.

Source: Le Courrier, «Ces méthodes secrètes d’expulsion», 20.04.2023.

À voir également: Le Courrier, «Expulsés par jet», 20.04.2023.

Cas relatifs

Cas individuel — 04/12/2025

Le TF déboute le SEM et le TAF pour avoir arbitrairement changé la date de naissance d’un requérant mineur non accompagné

Ismail* arrive seul en Suisse en septembre 2023, à l’âge de 16 ans. Lorsqu’il dépose sa demande d’asile, il indique être né le 8 avril 2007 et fournit deux documents corroborant ses dires. Malgré la reconnaissance de la minorité d’Ismail* par l’Italie, pays par lequel il a transité, le SEM modifie sa date de naissance après l’avoir interrogé sur ses données personnelles lors d’une première audition mais sans réaliser d’expertise médico-légale. Saisi par recours, le TAF confirme la décision du SEM, bien qu’il admette que le choix de la date a pour seul but de rendre Ismail* majeur. Ce dernier dépose alors un recours au TF qui lui donne finalement raison, estimant qu’aucun élément ne permet de remettre en question ses propos et que s’il avait un doute sur son âge, le SEM aurait dû procéder à une expertise médico-légale.
Cas individuel — 27/05/2016

Un père arraché à son épouse enceinte et ses enfants

« Awat » habitait à Genève avec son épouse « Mariame » enceinte de trois mois, et leurs deux filles, « Melete » et « Awatif ». Enfin réunie après un long périple et un exil forcé, cette famille se voit à nouveau séparée, cette fois par les autorités suisses : le père est renvoyé en Italie. Le Tribunal ne retient ni son droit à la vie familiale, ni l’intérêt supérieur de ses enfants à grandir auprès de leur père.
Cas individuel — 14/07/2014

La Suisse condamnée par la CourEDH pour avoir ordonné le renvoi d’un père dont la fille mineure vit en Suisse avec un permis F

Gabriel*, Marisol*, Diana* la fille de Marisol*, et Jessica* leur fille commune, déposent une demande d’asile en Suisse en 2002. Après un premier refus, leur procédure est réouverte. En 2009, le couple se sépare mais reste marié et en contact régulier. L’autorité parentale sur Jessica* est attribuée à Marisol*, mais Gabriel* est très impliqué dans la vie de sa fille avec un droit de visite élargi. Suite à un nouveau rejet de leur demande d’asile, le couple saisit le TAF. Ce dernier considère alors que comme Marisol* et Gabriel* sont séparés, leur demande doit être examinée distinctement. Il octroie une admission provisoire à Marisol* et Jessica* au motif de l’intégration de cette dernière en Suisse, mais confirme le renvoi de Gabriel*. Le coupe fait appel à la CourEDH, qui casse cette décision. Elle décrète que le renvoi de Gabriel* violerait le droit fondamental à la vie privée et familiale tel que protégé par l’art. 8 CEDH