Les locaux de l’EVAM occupés pour dénoncer les conditions de vie des migrants à l’aide d’urgence

Le 11 juin 2014 une quarantaine de personnes a occupé symboliquement les locaux administratifs de l’EVAM (Etablissement Vaudois d’Accueil aux Migrants) à Lausanne pour dénoncer certaines pratiques à l’égard des requérants d’asile à l’aide d’urgence dans le canton de Vaud. Relayant les appels d’employés de l’EVAM et d’autres professionnels de la santé et du social, le « Groupe 11 juin » dénonce les lourdes conséquences  de certaines pratiques sur la santé psychique et physique des personnes concernées et demande un changement de régime pour l’accueil des migrants.

La critique porte sur le placement de personnes malades dans des abris antiatomiques contre l’avis des médecins, le déplacement de familles d’un foyer à l’autre au détriment de la scolarité des enfants, la résiliation de l’assurance maladie pour certains requérants déboutés, l’exclusion temporaire de migrants des foyers en guise de sanction pour des entorses mineures au règlement, ou encore l’hébergement en « sleep-in » ouverts uniquement la nuit, que les personnes doivent quitter à 7h du matin sans pouvoir laisser aucun effet personnel. Les effets relevés en termes de misère sociale et de santé publique sont graves : les dépressions, crises d’angoisse, automutilations et tentatives de suicide sont nombreuses. S’y ajoutent de multiples difficultés psychosociales telles que la consommation de substances psychotropes, qui contribuent à engendrer un climat de violence dans les foyers. Pour les personnes ayant fui la guerre, comme les Syriens, le logement en abri antiatomique peut se révéler anxiogène, réveillant leurs traumatismes.

Les militants réclament notamment la mise en place d’une commission indépendante chargée d’enquêter sur les dysfonctionnements de l’EVAM, un plan urgent en matière de santé des migrants, la levée de l’interdiction de travail frappant les requérants déboutés et l’abolition du régime d’aide d’urgence dans le canton de Vaud.

Sources :

Site web Appel 11 juin

Le Courrier, Des militants occupent l’EVAM, 12 juin 2014

RTS info, Occupation symbolique des locaux administratifs de l’EVAM à Lausanne, 12 juin 2014

Cas relatifs

Cas individuel — 17/12/2025

Régularisation refusée après 9 ans de vie en Suisse, à cause d’un séjour de cinq mois en Autriche

Saif*, ressortissant irakien, demande l’asile en Suisse en 2016. Après un refus, il se rend en Autriche où il sollicite également l’asile. Renvoyé en Suisse en 2017 en vertu du règlement Dublin, il survit à l’aide d’urgence. En 2024, il demande la régularisation de son statut auprès de l’Office cantonal de la population qui refuse, au motif que son lieu de séjour n’était pas connu entre octobre 2016 et mars 2017. En mai 2025, après 9 ans d’aide d’urgence, l’état psychique de Saif* se détériore et il suit un traitement médical. Avec l’aide d’une mandataire, il dépose une nouvelle demande de réexamen sur la base de l’art. 83 al. 4 LEI. Le SEM rejette cette demande, estimant que l’accès aux soins est possible en Irak.
Cas individuel — 09/10/2025

Une famille avec trois enfants se trouve à l’aide d’urgence depuis 10 ans

Fuyant des représailles familiales suite à une grossesse issue d’un viol, Susanne* demande l’asile en Suisse en 2013. Elle donne naissance à son premier enfant peu après. Sa demande est rejetée en avril 2014. En octobre 2018, son mari Bernard* la rejoint en Suisse. Sa demande d’asile est également refusée. En 2019 puis 2021, Suzanne* donne naissance à deux autres enfants. La plus jeune est diagnostiquée d’un trouble du spectre autistique, d’une microcéphalie légère, d’un retard de croissance et d’un trouble alimentaire, pour lesquels elle a besoin d’un accompagnement socioéducatif spécialisé, d’un suivi médical et d’une surveillance quotidienne. La famille demande à plusieurs reprises au SEM le réexamen de leur demande d’asile, mais leurs requêtes sont toutes rejetées. En octobre 2025, la famille se trouve toujours en Suisse, sans espoir de régularisation. Les deux parents et les trois enfants vivent à l’aide depuis plus de 10 ans.
Cas individuel — 30/01/2024

Gravement atteint dans sa santé, il survit à l’aide d’urgence depuis 7 ans

«Je n’ai pas de permis, je dois donc me battre à deux niveaux: pour ma situation administrative et pour ma santé.» Atteint d’une maladie grave qui affecte le système nerveux, Badri* est venu en Suisse afin d’être soigné car il ne pouvait pas l’être en Géorgie. Il demande l’asile, mais sa requête est rejetée par le SEM qui ordonne son renvoi. Badri perd peu à peu son autonomie, son corps se paralyse. Une opération en 2021 lui redonne une mobilité partielle, mais il a besoin d’un suivi médical pluridisciplinaire régulier. Il demande alors le réexamen de la décision du SEM en démontrant l’absence de soins en Géorgie, mais il reçoit à nouveau une réponse négative. Depuis sept ans, Badri survit donc avec une aide d’urgence de 275 CHF/mois.
Cas individuel — 07/05/2014

Malgré l’impossibilité du renvoi, une famille passe 4 ans à l’aide d’urgence

Menacé en Palestine, « Issam » prend la fuite avec sa femme « Samra ». La Suisse leur refuse l’asile en 2003, décision confirmée sur recours en 2009. L’ODM, informé dès 2009 que le retour en Cisjordanie est rendu impossible par les accords d’Oslo, ne statue sur leur demande de réexamen qu’en avril 2014, malgré les graves problèmes psychiques de « Samra ». En attendant, le couple et ses 3 enfants seront restés 4 ans à l’aide d’urgence.